vendredi, mars 24, 2023
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Un regard sur les projets d’armes nucléaires de l’Iran – 1ère partie

CNRI – Le projet d’armes nucléaire clandestin du régime iranien a traversé diverses phases en près de trente ans. 2002 a été marqué par un tournant majeur quand le Conseil national de Résistance iranienne (CNRI) et l’Organisation des Moudjahidine du peuple d’Iran (OMPI) ont révélé un site secret d’enrichissement d’uranium à Natanz et une installation d’eau lourde à Arak.

La révélation a envoyé des ondes de choc au régime et l’a forcé à se lancer dans des manœuvres pour dissimuler la nature militaire de son programme. Cela a aussi lancé une enquête de l’agence atomique de L’ONU (l’AIEA) qui a finalement poussé le Conseil de sécurité à imposer des sanctions.
Les premières révélations de la résistance iranienne sur les activités nucléaires des mollahs, remontent en fait à juin 1991. Une enquête plus minutieuse révèle que l’acquisition d’armes nucléaire par le régime était à l’ordre du jour depuis les premières années qui ont suivi la révolution de 1979 et qu’elle a formé un pilier de la doctrine stratégique et intégriste de Khomeiny pour la survie de son régime.
Toutes les décisions sur les activités nucléaires ont toujours été faites aux plus hauts niveaux. La recherche avancée du CNRI a aussi établi que les gardiens de la révolution ont systématiquement joué un rôle stratégique dans la campagne à facettes multiples pour obtenir des armes nucléaires.
Voici la première partie d’une étude du CNRI sur les activités nucléaires du régime iranien.

Le régime des mollahs et la bombe nucléaire

LE DEBUT : DE 1979 À 1988
Après la chute du chah en 1979, les activités de l’Organisation de l’énergie atomique iranienne (OEAI) ont été suspendues sous le gouvernement provisoire de Mehdi Bazargan. L’analyse officielle était que l’énergie atomique n’était pas nécessaire en raison des ressources en pétrole et en gaz.
En 1981, le régime des mollahs a décidé d’ouvrir la voie à l’acquisition des armes nucléaires et à la technologie associée. Mohammad Hossein Behechti (un des mollahs les plus proches de Khomeiny) a déclaré aux directeurs de recherche nucléaires du pays que la politique officielle était l’acquisition d’une arme nucléaire.
Pour faire avancer son plan, le régime s’est lancé dans deux groupes d’activités. D’une part, les gardiens de la révolution (pasdaran) ont ajouté le nucléaire militaire à leurs recherches et d’autre part l’OEAI a été réactivée dans une double approche.

1. En 1983, les pasdaran ont créé l’Unité spéciale de recherche nucléaire dans le complexe central de recherches des pasdaran. Ce centre clandestin était situé dans le nord de Téhéran, près de la place de Vanak, et employait des experts nucléaires de diverses universités.
2. En 1983, le président du parlement des mollahs Rafsandjani a convoqué les experts de l’OEAI qui avaient été révoqués pour les inviter à reprendre leurs activités à l’agence nucléaire.

Tentatives des pasdaran pour se doter d’armes nucléaires
Fin 1986 – début 1987, les pasdaran ont lancé une série d’offensives contre l’Irak, du nom de code Karbala 4 et Karbala 5, dans le but de s’emparer de Bassora, mais ils ont essuyé une défaite sanglante.
Après cette défaite, dans un discours en 1987, Khomeiny s’est adressé aux hauts responsables de l’OEAI et des pasdaran pour souligner la nécessité de se doter d’une arme nucléaire.
Après le discours de Khomeiny, Mohsen Reza’i, à l’époque chef des pasdaran, a pris personnellement la responsabilité du suivi des armes nucléaires. A cet effet il a mené de nombreuses activités comme :
1. Le centre de recherche des pasdaran pour acquérir l’expertise scientifique et la technologie pour développer des armes nucléaires a établi des relations actives avec la Russie et le Pakistan et conduit des négociations et des collaborations avec ces deux pays.
2. Depuis 1987, un des centres de recherche nucléaires des pasdaran sous le couvert de « Centre de formation des pasdaran pour cadres techniques de la marine » a été activé. Il a été placé près de la section de Lavizan à Téhéran et entretenait des relations nucléaires actives avec la Russie et le Pakistan.
3. Des relations avec Abdul Qader Khan (Père des armes nucléaires du Pakistan) : En 1987, trois officiers supérieurs des pasdaran ont rencontré Abdul Qadeer Khan à Téhéran au moins à deux reprises. À l’époque la mission principale du centre de recherche était la recherche en matière d’armes nucléaires. Les réunions entre les commandants des pasdaran et Abdul Qader Khan ont été coordonnées par Reza Amrollahi, alors chef de l’OEAI.
4. Mohsen Reza’i, alors commandant en chef des pasdaran, a personnellement rencontré des professeurs de physique universitaires en 1987 pour les inviter à collaborer dans la recherche nucléaire. Les professeurs recrutés ont commencé à travailler au « Centre de formation des pasdaran pour cadres techniques de la marine » de Lavizan.

EXPANSION DES ACTIVITÉS NUCLÉAIRES – 1988 à 1993

1. La « coupe de poison » du cessez-le-feu et la nécessité de produire une bombe atomique
Le 16 juillet 1988, deux jours avant l’annonce du cessez le feu dans la guerre avec l’Irak, Khomeiny écrit une lettre expliquant la nécessité d’une trêve. Il met en avant les avis des commandants militaires plaidant que « si on avait 350 brigades, 2500 chars, 3000 pièces d’artillerie, 300 avions de chasse et 300 hélicoptères ainsi que la capacité de construire une quantité importante d’armes laser et nucléaires qui était nécessaires pour la guerre à l’époque, alors, si Dieu le veut, nous pourrons mener des offensives ».

2. Stratégie de défense préventive
Après la mort de Khomeiny, en 1989, le régime a approuvé la stratégie de défense préventive. La stratégie consistait à faire face à la menace selon laquelle «les ennemis de la république islamique et de son idéologie islamique voudraient, à un moment donné, recourir à la menace militaire ou à une attaque, afin d’empêcher la diffusion de l’influence de ce pays. » La stratégie, qui continue à ce jour, est basée sur trois piliers :
• La capacité de tolérer de lourdes pertes dans les batailles à long terme ;
• Disposer d’un énorme arsenal militaire contenant des missiles de moyenne portée et de longue portée pour remédier aux faiblesses lors des opérations aériennes et
• Un arsenal nucléaire pour arrêter les grandes puissances, comme les États-Unis.
Le guide suprême des mollahs Ali Khamenei et les commandants militaires du régime ont cru que « l’axe central de confinement de cette stratégie est la possession d’armes nucléaires qui pourraient empêcher les attaques. La défense nationale de l’Iran, sans avoir de puissance nucléaire, n’aura pas beaucoup de valeur ».

3. Le projet de Mo’allem Kelayeh
Dès 1989, les pasdaran ont travaillé sur un projet d’enrichissement d’uranium appelé «Plan Alamout» mené à Mo’allem Kelayeh. Ce projet était connu sous le nom Mo’allem Kelayeh. Il a été réalisé dans la région Alamout de Qazvine dans le domaine de Khoshkchal et, afin de le garder secret vis-à-vis de la population locale, les pasdaran ont déplacé les habitants vers d’autres régions.
L’OMPI a révélé ce projet d’enrichissement en juin 1991. En 1992, l’AIEA a demandé au régime de lui fournir une explication. Le régime a prétendu qu’il n’y avait pas de projet sérieux mené à cet endroit. Ce n’est qu’en 2003 que le site a été visité par l’AIEA, qui a confirmé que de l’uranium avait été enrichi à cet endroit. Une fois que sa tromperie révélée, dans une lettre datée d’octobre 2003, le régime a été forcé d’admettre que, de 1998 à 2003, il enrichissait l’uranium sur le site.

4. La stratégie de Rafsandjani pour doter les pasdaran de la bombe atomique
Dans un rapport à Rafsandjani en 1991, l’unité nucléaire spéciale des pasdaran explique la difficulté à obtenir des armes nucléaires comme un manque de coopération des pays étrangers à fabriquer des installations clés et des techniques disponibles.
Par la suite, Rafsandjani a tenu une réunion conjointe avec l’unité nucléaire spéciale des pasdarans et de l’OEAI où la stratégie suivante a été formulée pour la réalisation des armes nucléaires :
1. Pour accéder aux installations nucléaires et à la technologie, nous devons activer des ressources diverses dans différents pays et nous engager dans la contrebande et dans des accords secrets pour obtenir la technologie nécessaire ;
2. Des ingénieurs iraniens de confiance et des experts doivent être envoyés à l’étranger sous différentes couvertures pour espionner et avoir accès à ces technologies, et
3. Nous devons profiter au maximum de la chute de l’Union soviétique pour apporter au service une expertise et des services spéciaux.

5. Exposer les décisions et activités nucléaires secrètes du régime
En juin 1991, Mohammad Mohadessine, le président de la commission des Affaires étrangères du Conseil national de la Résistance iranienne (CNRI), a exposé lors d’une conférence de presse aux Etats Unis, la stratégie de Rafsandjani et les activités spécifiques du régime de l’époque pour accéder à l’arme nucléaire, le budget alloué par le régime à cet effet, et les relations avec d’autres pays, y compris avec la Chine et le Pakistan. Cette conférence de presse a été largement couverte et des responsables du régime et des médias ont été contraints de réagir.

6. Tentative d’achat d’ogives au Kirghizistan
Après l’effondrement de l’Union soviétique, le régime a vu une occasion rare et a tenté sérieusement d’acheter des ogives nucléaires dans les Etats ex-soviétiques. La tentative la plus sérieuse a été faite au travers de l’achat d’ogives nucléaires au Kirghizistan.
En 1992, l’OMPI a appris que le régime était sur le point d’acheter trois ogives nucléaires au Kirghizistan et que cet achat avait été conclu lors d’une visite en Iran en 1992 du ministre des Transports du Kirghizistan, M. Aishin Kari et il a été convenu que l’Iran leur paierait en espèces.
La Résistance iranienne a dévoilé l’achat. Le 12 octobre 1992, le Washington Post écrivait : «L’Iran a mené des négociations secrètes pour acheter des ogives nucléaires à l’ancienne république soviétique du Kirghizistan, affamée d’argent, et grâce à un compte, a conclu l’affaire (…) L’administration Bush a été avertie, la semaine dernière, par un opposant iranien en exil dont les informations se sont révélées exactes par le passé. Son organisation basée en Irak, les Moudjahidine du Peuple, a appris que l’Iran avait signé le contrat et payé les ogives, mais que la livraison n’avait pas encore eu lieu ».
Malgré la dénonciation, le régime a continué à finaliser l’accord et en décembre 1992, Akbar Torkan, le ministre des Transports du régime et Amrollahi, le chef de l’OEAI se sont rendus au Kirghizistan pour signer l’accord et prendre livraison des bombes. Les autorités kirghizes ont déclaré que suite à la dénonciation de l’accord par l’OMPI, elles avaient dû faire face à la pression internationale, et en particulier à cause des pressions exercées par le Président russe Boris Eltsine, elles ne pouvaient pas mener à bien l’accord.
Quelques années plus tard, M. Bolat Nourgaliev, l’ambassadeur du Kirghizistan aux États-Unis, a confirmé l’existence de cet accord. À cet égard, le Washington Times le 2 novembre 1996 écrivait : « L’ambassadeur du Kirghizistan aux États-Unis a dit que l’Iran a tenté d’acheter des matériaux non identifiés à partir d’une grande installation nucléaire soviétique dans son pays mais que l’opération avait été arrêtée en 1992 alors que le matériel était prêt à être envoyé. M. Nurgaliyev dit qu’en 1992, alors qu’un Kirghizistan nouvellement indépendant a cherché à faire face à un énorme arsenal nucléaire sur son sol, les représentants iraniens ont pris contact avec le centre d’Oust-Kamenogorsk pour rechercher « certaines choses ».
Le Washington Times a également indiqué qu’un rapport de renseignement avait déclaré que les responsables iraniens ont en réalité visité l’usine, cherchant de l’uranium hautement enrichi pour le programme d’armement nucléaire du pays islamique.
Ainsi l’opposition iranienne avait, grâce à sa révélation opportune, empêché le régime iranien d’obtenir trois ogives nucléaires.