En mars 2020, lors de la parodie d’élections législatives du régime, le Conseil des gardiens a commencé à mettre sur la touche la faction dite « réformiste », conformément aux ordres du Guide Suprême, Ali Khamenei. Khamenei voulait un Majlis (Parlement des mollahs) rempli de loyalistes incontestés pour ouvrir la voie à une purge majeure lors de l’élection présidentielle de 2021, au cours de laquelle il cherchait à installer un » gouvernement de jeunes Hezbollahis. »
En juin 2021, le Conseil des gardiens a disqualifié même le principal conseiller de Khamenei, Ali Larijani, et le vice-président de l’époque, Eshagh Jahangiri, pour s’assurer que le chef du pouvoir judiciaire de l’époque, Ebrahim Raïssi, puisse obtenir la présidence.
L’état explosif de la société avait tiré toutes les sonnettes d’alarme pour Khamenei. Il savait que le moindre désaccord au sommet pouvait entraîner une répression rapide des soulèvements imminents. Des avertissements avaient été donnés à l’avance pour que « les responsables évitent de détruire l’unité et l’unanimité », car le résultat serait la « fragmentation » de l’ensemble du système face à une population aspirant au changement.
Cela fait maintenant cinq mois que Raïssi et son administration triée sur le volet ont été investis pour symboliser l' »unification » de l’ensemble du système. Mais les crises croissantes révèlent des fissures de plus en plus importantes. Les membres du Majlis attaquent le cabinet de Raïssi chaque fois qu’un ministre est convoqué, mettant en garde le président contre les conséquences de ses promesses vides, l’augmentation de la pauvreté et la menace croissante d’une explosion sociale. L’intensité des luttes intestines a atteint un point d’ébullition, obligeant Khamenei à interpeller les partis dans son discours à Qom le 9 janvier. Il a mis en garde le Majlis et le gouvernement contre la « division » et la « confrontation ».
Il est clair que l’intensité du conflit est telle que les efforts déployés en coulisses par Khamenei pour le contenir sont restés vains, et maintenant le Guide Suprême, impuissant, a été contraint d’accepter le scandale et les importantes pertes associées, tout en annonçant publiquement l’existence de divers « fronts » au sein de sa propre faction.
Une manifestation de cette « division » et de cette « confrontation » est apparue dans le cadre des pourparlers de Vienne. Dix mois se sont écoulés depuis le début des discussions, mais il n’y a aucune perspective réaliste de relancer l’accord nucléaire connu sous le nom de JCPOA ou de lever les sanctions.
Deux grands camps s’affrontent aujourd’hui en Iran
Le premier comprend le président du Majlis, Mohammad Bagher Qalibaf, l’adjoint présidentiel chargé des affaires économiques, Mohsen Rezaei, le conseiller principal du Guide Suprême, Ali Akbar Velayati, et d’autres responsables gouvernementaux. Ils soulignent que l’asphyxie économique et la gravité du danger d’explosion sociale ont atteint un seuil critique et qu’il n’y a pas d’autre solution pour le système que d' »interagir avec le monde » tout en se soumettant à la volonté des puissances mondiales.
L’autre camp est composé de personnalités comme Ahmad Alamolhoda, beau-père d’Ebrahim Raïssi et représentant de Khamenei à Machhad, ainsi que Hossein Shariyatmadari, rédacteur en chef du quotidien Kayhan, et d’autres voix ultraconservatrices qui seraient dirigées par Mojtaba Khamenei, le fils aîné du Guide Suprême. Ils affirment que l’état explosif de la société est très grave et que l’acceptation des conditions du P4+1 ne résoudra pas le problème, mais accélérera plutôt la désintégration du régime. Ils ajoutent qu’un tel résultat aggraverait la position affaiblie du régime tout en encourageant les opposants au régime et en ouvrant la voie à d’énormes troubles sociaux.
Ali Khamenei, qui s’efforce habituellement de paraître non partisan et évite de prendre des positions claires qui pourraient se retourner contre lui, a été contraint de sortir de sa cachette et de donner des instructions à sa propre faction pour éviter de contrarier davantage les autres factions. Mais comme le régime est confronté à une communauté internationale de plus en plus unie, à une région du Moyen-Orient plus unifiée et à une détermination sans précédent d’une société rétive à apporter des changements, ce n’est qu’une question de temps pour que le régime s’effondre et se voit renversé.