jeudi, mars 28, 2024
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« Il y a dans ce dossier une instrumentalisation manifeste de la justice » – Me Patrick Baudouin

Patrick BaudouinCNRI – « les autorités françaises se font les complices. Elles reprochent vainement et sans qu’il y ait le moindre élément de preuve, elles reprochent aux personnes qui ont été mises en examen au départ d’être « des terroristes », et en fait les autorités françaises se font les complices des vrais terroristes, qui sont les terroristes d’Etat, qui est le terrorisme de l’Etat iranien », a déclaré Me Patrick Baudouin, président d’honneur de la FIDH, dans une conférence le 17 juin au siège de la Ligue des droits de l’Homme.

« Le 17 juin 2003, une rafle de la police française est lancée contre le Conseil national de la Résistance iranienne et débouche sur la garde à vue puis la mise en examens de ses dirigeants et le blocage de ses avoirs. Il a été dénoncé plus tard que l’attaque contre ces opposants avait été décidée lors du voyage à Téhéran du ministre des Affaires étrangères, Dominique de Villepin. Depuis sept ans, tout a été fait pour éviter le non lieu-général qui s’impose. Aucune complaisance ne peut être de mise aujourd’hui vis-à-vis du régime de Téhéran. Le temps est venu pour la justice française de démontrer son indépendance en clôturant ce dossier enlisé ». Tel est le thème de la conférence de presse qui s’est tenue le 17 juin 2010 à la Ligue des droits de l’homme. Sous la houlette de Jean-Pierre Dubois, président de la LDH, étaient réunis Me Henri Leclerc, président d’honneur de la LDH, Me Patrick Baudouin, président d’honneur de la FIDH, Me Mario Stasi, ancien bâtonnier de Paris, Me Joseph Cohen-Sabban, Jean-Michel Belorgey, ancien président de l’intergroupe parlementaire de la LDH, François Colcombet, ancien juge-conseil à la cour de cassation, et Mohammad Mohaddessine, président de la commission des Affaires étrangères du CNRI.

Voici des extraits de l’intervention de Me Patrick Baudouin :

Il faut souligner d’emblée que cette affaire n’est pas à l’honneur de la France, cela parait une évidence. Il y a dans ce dossier depuis l’origine une instrumentalisation manifeste de la justice. Il est maintenant démontré que c’est un très vilain deal qui a été passé au printemps 2003 entre les autorités françaises et les autorités iraniennes, et qui a conduit à ce coup de filet d’Auvers-sur-Oise. Tout y était d’ailleurs puisque dans le cadre de cette instrumentalisation judiciaire, on va retrouver le juge de la raison d’Etat, c’est-à-dire le juge Bruguière, qui une fois de plus n’a pas hésité à fouler aux pieds certains principes précisément pour faire prévaloir des points de vue purement politiques. C’est maintenant, je crois, avéré.

On est parti tout à l’heure d’une affaire qui est peut-être extrêmement grave. Il y a eu 160 interpellations. Des gens accusés d’associations de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste, ce n’est pas une mince affaire. Et puis en définitif tout cela est tombé à l’eau. Il n’y a pas l’ombre d’un acte terroriste qui figure dans le dossier. Ensuite on est allé vers des délits de nature financière, bien malin qui peut dire quelle est l’organisation en exil qui n’a pas de moyen de financement qui parfois sont un peu difficiles, c’est une classique du genre et je ne pense pas que cela puisse aller très loin. Et puis il y a eu cet aspect sectaire pour essayer de donner une connotation qui justifie un peu tout ce qui se passe.

Voilà cela fait maintenant sept ans. Nos clients respectifs, moi je représente trois des personnes mises en examen, ont dû au maximum être entendu chacune d’entre elles trois fois, peut-être, avec des interrogatoires qui tournent au côté hallucinatoire. Evidemment on n’interroge pas sur les actes terroristes, puisqu’il n’y en a pas, mais on demande quelle est la famille, est-ce qu’on porte le voile, est-ce qu’on ne porte pas le voile, etc. Des choses qui n’ont strictement rien à voir avec le fond du dossier. Et là il ne se passe plus rien maintenant (…)

S’il y a un procès, public, tous les avocats des personnes mises en examen s’exprimeront, feront valoir leurs points de vue et je pense qu’il ne sera pas très difficile de démontrer que la chronique de ce fiasco judiciaire annoncé dès l’origine se concrétise au fil des mois, au fil des ans et ne peut que se terminer par une déroute du pouvoir politique qui a vainement instrumentalisé le pouvoir judiciaire.

Deux dernières observations : nous avons en permanence Henri Leclerc et moi des préoccupations très sérieuses et immédiates qui concerne d’une part les personnes qui se trouvent au camp d’Achraf et on sait que l’été qui arrive est préoccupant parce qu’il y a la crainte de voir les Américains abandonner totalement à leur sort les réfugiés qui se trouvent dans le camp d’Achraf. La situation serait dramatique si ces réfugiés se trouvent renvoyés en Iran où leur mort est une probabilité pour ne pas dire une certitude pour certains d’entre eux. Il faut alerter au maximum l’opinion publique. Nous intervenons avec d’autres organisations internationales dans le cadre onusien à Genève et il faut multiplier là les actions et les signaux d’alerte.

Deuxième observation c’est la situation iranienne aujourd’hui, avec la répression constante, les arrestations, voire les exécutions, qui frappe tous les mouvements d’opposition, mais qui frappent en particulier et spécialement les représentants de l’OMPI, les Moudjahidine du peuple, dont certains ont déjà été exécutés.

C’est quand même à mettre en relation avec ce qui se passe en France, parce qu’au bout du compte les autorités françaises se font les complices. Elles reprochent vainement et sans qu’il y ait le moindre élément de preuve, elles reprochent aux personnes qui ont été mises en examen au départ d’être « des terroristes », et en fait les autorités françaises se font les complices des vrais terroristes, qui sont les terroristes d’Etat, qui est le terrorisme de l’Etat iranien.

Ce que nous demandons aux autorités françaises c’est enfin de rétablir un minimum d’honneur et de mettre un terme à cette affaire des Moudjahidine du peuple en France.