CNRI – « Il y a dans ce dossier une particularité qui est la suivante. Je ne crois pas que dans l’histoire judiciaire française, il y ait eu un dossier où, le fossé se soit creusé et continue de se creuser à ce point, entre les positions des juges français, le droit européen, les décisions des juridictions européennes et les avis juridiques de très éminents professeurs de droit », a déclaré Me William Bourdon.
Il s’exprimait le 4 mars lors d’une conférence à Paris intitulée «Justice pour la Résistance iranienne», qui rassemblait juristes de renom et personnalités politiques venus examiner les moyens de mettre un terme à l’information judiciaire ouverte le 17 juin 2003 contre des opposants iraniens. Trois avis juridiques remarquables du Pr. Cassese, du Pr. Labayle et du Pr. Bouloc ont été présentés. L’invitée d’honneur était Maryam Radjavi, présidente élue de la Résistance iranienne.
Voici des extraits se son intervention :
J’assure la défense et les intérêts de l’opposition iranienne depuis plusieurs années. Nous œuvrons inlassablement avec Henri Leclerc et d’autres pour tenter de convaincre l’autorité judicaire française qu’une seule et unique décision s’impose, qui est une décision de non-lieu.
Il y a dans ce dossier une particularité qui est la suivante. Je ne crois pas que dans l’histoire judiciaire française, il y ait eu un dossier où le fossé se soit creusé et continue de se creuser à ce point, entre les positions des juges français, le droit européen, les décisions des juridictions européennes et les avis juridiques de très éminents professeurs de droit.
Il y a une situation qui est quand même très paradoxale : Le droit européen est l’allié de l’opposition iranienne. Les juridictions sont l’alliée de l’opposition iranienne. Ce que le juge français devrait faire, le juge européen le fait. Le juge européen a ordonné la levée du gel des avoirs saisis, le juge français devrait le faire. Evidement, il y a toute une série d’explications politiques économiques à ce fossé qui ne cesse de se creuser, et le rôle des avocats c’est à un moment donné de faire en sorte que cesse l’isolement de la France, parce qu’il s’agit bien de cela, et qu’elle accepte de rejoindre les valeurs européennes inscrites dans les différentes décisions rendues par le tribunal de Luxembourg.
Il y a avait un ensemble de charges au début qui étaient les suivantes : la colonne vertébrale, des charges contre l’opposition iranienne, c’était l’inscription de l’OMPI [sur la liste terroriste]. Cette colonne vertébrale a volé en éclat. Il y a avait des notes de la DST qui ne valent que ce que valent les notes de la DST, c’est à dire rien. Il y avait les témoignages des repentis instrumentalisés par les services secrets iraniens qui ne valent rien.
Nous, nous pensons que face à cet extraordinaire fiasco judiciaire, il n’y a que deux alternatives possibles. Pas 36 : deux ! Soit c’est une ordonnance de non lieu, soit c’est un procès, public, transparent. Ce procès sera évidement un immense procès politique qui à mon sens tournera au désavantage de l’autorité judiciaire française. Un procès éminemment politique, dangereux pour l’image de la France et qui à mon avis se terminera par une seule et unique décision possible : rendre à l’opposition iranienne l’honneur qu’on tente aujourd’hui encore de lui souiller.