Mettre fin à la menace iranienne se fera en parlant aux bonnes personnes, pas en leur tirant dessus
Par Struan Stevenson, Eurodéputé*
The Scotsman, 27 décembre Le discours belliqueux de Tony Blair à Dubaï dans lequel il a dénoncé lIran comme étant la plus grande menace pour la paix aux Moyen-Orient marque une sorte de tournant dans les messages de plus en plus confus du Premier ministre en politique étrangère. Il y a à peine trois semaines, il exhortait son grand copain George Bush à appeler lIran à laide pour résoudre la catastrophe quils ont tous les deux créée dans lIrak voisin. Comme dhabitude M Bush a dit à M. Blair dopérer immédiatement un revirement complet de politique.
Au moins pour linstant, M. Blair semble être dans la bonne direction. Un des principaux problèmes de politique étrangère pour lUnion européenne, cest de savoir comment traiter le régime de Téhéran. Ses efforts pour se doter de larme nucléaire, ses appels répétés à la destruction dIsraël, sa négation de lHolocauste et son ingérence en Irak sont tous des raisons de grande inquiétude, sans la moindre solution facile en vue.
Mais un jugement de la Cour européenne de justice la semaine dernière pourrait donner une occasion en or à lUE dadopter une nouvelle politique de fermeté avec lIran à la seule condition que les décideurs politiques de Bruxelles saisissent ce moment. Le tribunal de Première instance de la Cour européenne a annulé le 12 décembre la décision commune du Conseil des ministres de lUnion européenne » de placer lorganisation des Moudjahidine du peuple dIran (OMPI), le principal mouvement de résistance iranien, sur la liste terroriste du bloc. Le jugement a annulé la décision prise en 2002 de geler tous les avoirs européens de lOMPI. .
Dans son jugement, la cour européenne a dit que le groupe navait pas bénéficié dune audience équitable pour se défendre. « constate que certains droits et garanties fondamentaux, notamment les droits de la défense, lobligation de motivation et le droit à une protection juridictionnelle effective, sont en principe pleinement applicables », a dit la cour. A lévidence la décision mettra lUE dans lembarras. Cela pourra forcer le bloc à repenser la manière dont il prépare sa liste noire, et en résultat, elle pourrait forcer les Etats membres à faire la lumière sur les travaux internes de la liste du terrorisme de lUE en 2007.
La réalité pourrait être très différente. Le jugement de la cour pourrait être une bénédiction sous couvert et aider lUE à prendre une nouvelle direction vis-à-vis de lIran. Pendant seize ans, lUE a misé sur la négociation avec une faction modérée au sein du régime iranien. Cela a commencé avec la mort de layatollah Khomeiny en 1989 et la présidence dAli-Akbar Hachemi Rafsandjani, que lon avait adoubé du qualificatif de « pragmatique ». Puis, en 1997, lEurope avait vu un nouvel espoir lélection de Mohammad Khatami, un président soi-disant modéré. Les Européens ont adapté leur rapprochement avec Téhéran pour huit nouvelles années, durant lesquelles ils nont pas condamné le bilan répressif de lIran sur la torture, les exécutions et la brutalité. A la place, ils ont entamé un dialogue des droits de lhomme avec les bourreaux, développé leur commerce et autorisé Téhéran à se lancer à pleine vitesse vers son objectif de se doter darmes nucléaires. La complicité européenne, son approbation et son habitude récurrente de fermer les yeux se sont poursuivies tranquillement.
Pour couronner le tout, lUE a taxé lOMPI dorganisation terroriste. De hauts diplomates européens, dont lancien ministre britannique des affaires étrangères Jack Straw, ont reconnu que lOMPI y figurait principalement comme une offre denchères dans un effort de rapprochement avec Téhéran.
La fantaisie modérée a totalement échoué lan dernier quand le guide suprême du régime, Ali Khamenei, a élaboré lélection de Mahmoud Ahmadinejad, un commandant pur et dur des gardiens de la révolution comme président, brisant tous les rêves (qui nétaient que des rêves) sur les réformes ou la modération. Seize ans de concessions et de négociations avec le régime lui ont donné lopportunité de mettre au pouvoir les factions les plus extrémistes.
A présent les mollahs de Téhéran froncent les sourcils en direction de lUE en rejetant toutes les résolutions de lONU, dans leur course à larme atomique. Ils continuent dalimenter linsurrection en Irak, avec de largent, des hommes et des armes. Ils financent le Hamas en Palestine et ont été les trésorier du Hezbollah dans la dernière guerre contre Israël au Liban. Et par-dessus tout, Téhéran ne cesse dappeler à la destruction de lEtat dIsraël. Il aura bientôt le moyen de mettre sa menace à exécution.
Il est temps dadopter une politique différente avec lIran et une nouvelle approche de lopposition iranienne doit en faire partie. Mme Maryam Radjavi, la présidente élue de la Résistance iranienne, a rappelé lors dune réunion au Parlement européen à Strasbourg la semaine dernière, que la bonne politique concernant lIran nest ni la complaisance ni une invasion militaire étrangère. Ce qui est nécessaire, cest plutôt un changement de lintérieur de lIran, qui peut recevoir une aide de lOccident sous la forme dun soutien moral et politique aux Iraniens et au principal mouvement de résistance. Les troubles récents dans les universités et leurs provocations ouvertes contre M. Ahmadinejad indiquaient clairement que la population est prête pour un changement.
A la lumière de la décision de la cour de Luxembourg, maintenir lOMPI sur la liste terroriste de lUE serait une énorme erreur de lUE sous tous les points de vue. Dun point de vue légal, cela reviendrait à défier lordre de la Cour européenne, en se moquant de la justice européenne et du système de contrôle et déquilibre de lUE. Dun point de vue politique, ce serait un fiasco parce quil enverrait le pire des messages de complaisance et de faiblesse aux mollahs de Téhéran. Apaiser les mollahs na jamais marché. La manière de traiter avec un despote fasciste comme Ahmadinejad, cest dadopter une position de force. Il semble que pour une fois, M. Blair ait vu juste lIran pose réellement la plus grande menace à la paix mondiale. Réglons le problème en Iran et la paix suivra au Moyen-Orient. Et la manière de régler le problème en Iran cest den soutenir la population courageuse à travers son principal groupe dopposition lOMPI.
*Struan Stevenson est un eurodéputé écossais conservateur. Il est vice président du groupe PPE-DE de 265 membres du Parlement européen et co-président lintergroupe des Amis dun Iran libre.