
Lorsque le Guide Suprême du régime iranien, Ali Khamenei, a nommé Ebrahim Raïssi à la présidence, tous les responsables et les médias officiel de son soi-disant « système consolidé » ont fait l’éloge de l’ascension de Raïssi à son nouveau poste. Pourtant, près de deux ans plus tard, et à la lumière d’un soulèvement national, ces mêmes responsables et médias officiels critiquent son incompétence.
L’exemple le plus récent est un article publié le 13 mai dans le journal « Resalat », proche de la faction de Khamenei. L’article réfléchit aux conséquences de l’incapacité de Raïssi à faire face aux crises du pays. « Ignorer les gens induira leur colère et leur frustration », prévient l’article.
« Honorables ministres ! Comment comprenez-vous ou ressentez-vous la montée en flèche de l’inflation et les difficultés à payer le loyer lorsque vous ne faites qu’aller du parking de votre maison à celui de votre ministère ?”, écrit Resalat.
La semaine dernière, Solat Mortazavi, ministre de la Protection sociale de Raïssi, a effrontément invité les travailleurs à la satisfaction lorsqu’on l’a interrogé sur l’insuffisance de leurs salaires.
Watch and judge how #Iran's state officials respond to the suffering, hunger and poverty of the people they have plundered in the last four decades. pic.twitter.com/OT7VrBhL4P
— NCRI-FAC (@iran_policy) 31 janvier 2023
Faisant mention aux détournements de fonds astronomiques et à la corruption omniprésente du régime, le journal officiel Resalat a écrit avec sarcasme : « Ceux qui ont des richesses astronomiques lancent des aspirations sur les travailleurs, les invitant au contentement ! »
« Ceux qui vont du parking de la maison au parking du ministère et de l’organisation, et de telle réunion à telle autre, et dont les employés font tout pour eux, de l’achat d’une maison à l’inscription de leurs enfants à l’école, ne comprennent pas l’inflation, ni la baisse du pouvoir d’achat. Ils ne connaissent pas les paiements échelonnés, les prêts et les garants. Ils ne ressentent aucune douleur, mais tiennent des propos surprenants« , ajoute Resalat.
L’article de Resalat est le dernier fait révélant les luttes intestines croissantes du régime. La semaine dernière, le Majlis (Parlement des mollahs) a destitué Reza Fatemi Amin, le ministre de l’Industrie, des mines et du commerce de Raïssi, quelques jours seulement après que Khamenei a exhorté les responsables à rester « unis« .
La destitution de Fatemi Amin a rapidement suivi la décision de Raïssi de limoger deux membres du cabinet, le ministre de l’Agriculture et le président de l’organisation de la planification et du budget, le 15 avril. Contrairement aux ministres de l’Education et du Travail, qui ont présenté leur démission, les deux évincés ont refusé catégoriquement de partir de leur propre chef.
Ignorant ouvertement les directives explicites de Khamenei le 22 avril, le Majlis est allé à l’encontre de ses recommandations en reconnaissant la corruption rampante pendant la procédure de destitution de Fatemi Amini. « Une stratégie primordiale consiste à éviter les distractions et la propagande fabriquée par l’ennemi. Face aux rumeurs entourant les [méfaits et la corruption] d’un responsable, il faut s’abstenir de s’en faire l’écho ou de les amplifier« , a-t-il déclaré.
Depuis 2020, dans le but de consolider le régime, Khamenei a propagé la vision d’un gouvernement « jeune et Hezbollahi », fermement aligné sur son programme et ses politiques face à une société agitée. Il a personnellement choisi le Majlis et a méticuleusement orchestré les élections présidentielles manipulées de 2021 pour garantir la victoire de Raïssi, un exploit qu’il a salué comme « l’événement le plus gratifiant de 2021« .
Ces luttes de pouvoir internes érodent davantage la force du régime. C’est pourquoi le journal officiel Resalat a mis en garde les responsables contre les conséquences désastreuses de l’engagement dans des conflits internes.
Faire des promesses creuses à la population et émettre de telles directives s’apparente au sinistre décret de Marie-Antoinette « qu’ils mangent du gâteau ! » avant la révolution française. Il semble que la naïveté n’ait pas de limites et qu’elle s’étende au-delà de Marie-Antoinette, alors que les répercussions du mécontentement ne se limitent pas à Paris« , a mis en garde du journal Resalat.