
Le régime iranien est pris dans une crise de légitimité, pris entre la peur paralysante d’une rébellion intérieure et la menace imminente de pressions étrangères. Alors que la question de l’engagement de négociations directes ou indirectes avec les États-Unis continue de tarauder les plus hautes sphères de Téhéran, les responsables peinent à justifier leurs positions auprès de leur propre base désillusionnée. La simple suggestion d’un compromis a suscité colère, suspicion et ressentiment parmi ses fidèles, révélant une crise de confiance qui menace de briser le régime de l’intérieur.
Un message fracturé
Lors des récentes prières du vendredi, les représentants du Guide suprême Ali Khamenei ont cherché à rassurer les forces du régime, en pleine démoralisation, par une rhétorique enflammée. Mais leurs tentatives de rallier les troupes n’ont fait que révéler un sentiment d’insécurité et de déclin plus profond.
Hassan Abedian, chef de la prière du vendredi à Ardabil, a prononcé un discours le 4 avril 2025, truffé de contradictions et d’aveux de peur. Ses propos ont révélé un désespoir croissant chez les responsables qui tentent d’empêcher l’effondrement de leur base.
« Nous sommes plus inquiets des balles qui nous atteignent l’esprit que des bombes qui nous tombent sur la tête. Désormais, ce ne sont plus nos cœurs qui sont touchés, mais nos esprits », a admis Abedian. Son discours reflétait l’effritement de la cohésion idéologique du régime. Si des destroyers américains se déplacent ou si des bombardiers arrivent, il est très peu probable qu’il s’agisse d’une attaque directe. Ce ne sont que des outils pour nous bombarder les esprits et nous priver de notre dignité. »
Le commentaire le plus révélateur d’Abedian : « S’ils nous forcent à négocier, ce sera sous la menace de la mort. Et si nous négocions mais refusons leurs exigences, ils continueront de nous menacer de mort. »
Mobilisation désespérée
Ahmadreza Radan, commandant des forces de sécurité de l’État, s’est vanté lors d’une interview télévisée du déploiement de 250 000 agents de sécurité pendant la fête de Norouz. L’ampleur vertigineuse de l’opération, censée signaler une prise de contrôle, n’a fait qu’accentuer la panique du régime.
« Des frontières aux villes, des villes aux villages, et des villages aux routes, nous sommes déterminés à renforcer la sécurité. L’objectif est de garantir qu’aucun criminel ne se sente en sécurité », a déclaré Radan. Sa description des confinements totaux, des patrouilles aux frontières et de la surveillance constante révèle un régime si terrifié par les troubles qu’il considère même les rassemblements mineurs comme des menaces existentielles.
L’affirmation de Radan selon laquelle il assure « la sécurité de nos chers citoyens » dissimule mal ce qu’il entend réellement par là : protéger la survie du régime. Sa militarisation de la vie quotidienne vise moins la prévention de la criminalité que la répression préventive de la dissidence.
Luttes intestines et peur des défections
La peur existentielle du régime ne se manifeste pas seulement chez ses ennemis nationaux ou étrangers, mais aussi par des fractures au sein de ses propres rangs. Mohammad Manan-Raisi, député de Qom, a récemment averti que la non-application des lois sur le port obligatoire du hijab entraînerait une perte de motivation du « noyau dur » du régime pour défendre le système.
Une réponse cinglante de l’Asr Iran, l’organisation étatique, a révélé la terreur interne du régime : « Si vous ne recevez pas votre financement, si vos qualifications pour vous présenter au Parlement ne sont pas approuvées, si vous êtes tenus responsables de vos positions, alors ces mêmes révolutionnaires incendiaires tireront l’épée contre ce système ou disparaîtront comme s’ils n’avaient jamais existé.»
Même les responsables fidèles au régime craignent désormais des défections massives et l’effondrement de leur base de soutien. Lorsque des sources internes avertissent que des éléments « du noyau dur » pourraient déserter le système, cela signale une crise bien plus profonde.
Faire face au pire des deux mondes
Le problème du régime ne se résume pas à décider s’il faut négocier ou non. Khamenei comprend qu’apaiser les États-Unis en faisant des compromis sur des questions fondamentales comme son programme nucléaire, son arsenal de missiles et ses intermédiaires régionaux risquerait de briser l’ossature du pouvoir du régime. De telles concessions anéantiraient la crédibilité du régime et provoqueraient des défections massives au sein de la base, qui a constitué son seul véritable soutien.
Mais la défiance est tout aussi périlleuse. Alors que les responsables tentent de rallier leurs propres forces avec des slogans de « sécurité » et de « résistance », il est clair que leur plus grande crainte n’est pas les bombardiers américains, mais un nouveau soulèvement national. Leur véritable crainte est que les masses désillusionnées, meurtries par des années de pauvreté, d’injustice et de violence d’État, s’emparent des vulnérabilités du régime et le fassent tomber de l’intérieur.
Toute concession faite aux États-Unis mettrait le régime en péril. La crainte est qu’en cas de compromis, il y ait des défections massives et une impasse totale. L’effondrement du noyau dur dont il a désespérément besoin pour se défendre face à une société débordante de ressentiment. Khamenei est paralysé, incapable d’avancer ou de reculer, et son régime est abandonné à l’abandon, acculé et pétrifié par ses propres contradictions internes.