
Le régime iranien montre des signes de profonde anxiété face à la vague croissante de manifestations étudiantes suite au meurtre d’Amir Mohammad Khaleqi, un étudiant de 19 ans de l’université de Téhéran. Alors que les manifestations se propagent dans les universités, les autorités s’efforcent de contenir les troubles tandis que les médias d’État diffusent des récits contradictoires pour détourner la responsabilité des autorités.
La télévision d’État iranienne, dans une émission du 15 février, a tenté de présenter le meurtre de l’étudiant comme un incident criminel isolé, soulignant que « deux voleurs armés à moto ont pris la vie de Khaleqi en moins de trente secondes ». Le rapport souligne également que « dès les premiers instants, le chef de la police de Téhéran, Ahmadreza Radan, a ordonné une enquête spéciale et le président a chargé le ministre des Sciences d’enquêter sur l’affaire ». Cependant, l’ampleur des manifestations et la colère des étudiants suggèrent une méfiance plus profonde envers la version des événements donnée par le gouvernement.
Alors que les manifestations se poursuivaient, des informations parues le 15 février dans les médias d’État ont confirmé que le président du régime, Masoud Pezeshkian, avait demandé aux autorités de « répondre rapidement aux griefs des étudiants pour empêcher que les manifestations ne s’étendent au-delà des portes de l’université ». Cette déclaration reflète les inquiétudes que les troubles étudiants pourraient dégénérer en un mouvement anti-gouvernemental plus vaste.
Dans une démonstration de discorde interne, le président par intérim de l’Université de Téhéran, Hossein Hosseini, a ouvertement critiqué la mauvaise gestion du gouvernement lors d’une émission en direct à la télévision d’État. Alors que les responsables tentaient de cadrer la discussion autour de la sécurité du campus, Hosseini a interrompu : « Nous sommes tous responsables de cela. Nous ne devons pas rejeter la faute sur les autres. » L’animateur de télévision a tenté de le faire taire en déclarant : « Nous ne sommes pas là pour créer des problèmes », mais Hosseini a refusé de céder.
Saeed Habibi, le vice-ministre des Sciences, a fait écho aux arguments habituels du régime, avertissant que « des éléments anti-révolutionnaires tentent d’exploiter ces manifestations ». Il a rassuré les médias d’État en affirmant que les autorités travaillaient dur pour « empêcher les ennemis étrangers de profiter des griefs des étudiants ».
Alors que les manifestations prenaient de l’ampleur, le régime iranien a accusé le mouvement de résistance organisé d’avoir tenté d’attiser les troubles. Le chef de la police de Téhéran, Abbasali Mohammadian, a affirmé le 16 février qu’un suspect avait été arrêté « alors qu’il tentait d’infiltrer la manifestation universitaire » et qu’il était « lié aux Moudjahidine du peuple (MEK/OMPI) ». Mohammadian a ajouté que « le personnel de sécurité a trouvé du matériel caché à l’intérieur de sa moto ».
Javan, le journal affilié au CGRI, a accusé les « chaînes antirévolutionnaires » de détourner les manifestations étudiantes et a affirmé que « des éléments étrangers hostiles utilisent les réseaux sociaux pour attiser le désordre ». De même, Mashregh News a affirmé que « la branche médiatique du MEK, Amir Kabir Newsletter, mène une tentative organisée pour transformer les revendications étudiantes en chaos ».
Raja News, un site Internet affilié à Saeed Jalili, a exigé une action immédiate contre la direction de l’Université de Téhéran, avertissant que « certains responsables alimentent le feu de la sédition ». Il a accusé le président de l’Université Hosseini de se comporter « comme le père de Mahsa Amini en 2022, en répandant des mensonges pour créer des troubles ». L’article a appelé les forces de sécurité à « empêcher une nouvelle vague de manifestations soutenues par l’étranger ».
Malgré les tentatives du régime de réprimer l’activisme étudiant, les manifestations se sont poursuivies. Le 15 février, les autorités ont déployé de manière préventive la police anti-émeute et les forces de sécurité en civil autour de l’Université de Téhéran, dissuadant les grands rassemblements. Cependant, des rapports de la chaîne Telegram de Kalemeh, affiliée à l’État, ont indiqué que plus de 400 personnes ont été arrêtées, dont des étudiants, des vétérans de guerre et même des membres de factions politiques au sein du régime.
Parmi les personnes arrêtées figurent Rahim Qomeishi, Naser Daneshfar et Akbar Sararoudi, tous d’anciens combattants de la guerre Iran-Irak. L’arrestation de ces personnalités, qui ont des liens historiques avec le régime, met en évidence les fractures croissantes au sein de l’establishment au pouvoir. En outre, Saeed et Saeedeh Montazeri, les enfants de l’ancien clerc dissident ayatollah Hossein-Ali Montazeri, ont également été placés en détention.
La réaction paniquée du régime iranien aux manifestations étudiantes souligne sa crainte d’une répétition des précédents soulèvements nationaux, comme ceux de 2019 et 2022, qui ont presque renversé le gouvernement. Dans son discours du 14 février, Ali Khamenei s’est vanté de la forte participation au rassemblement pro-régime du 11 février, mais son malaise était évident. Les analystes estiment que même des manifestations mineures, comme celles des vétérans de la guerre Iran-Irak ou des familles de prisonniers politiques, pourraient rapidement dégénérer en mouvements anti-régime plus vastes.
Les forces de sécurité continuent de procéder à des arrestations massives, mais la colère sur les campus universitaires n’est pas apaisée. Les discours contradictoires de l’État, les arrestations de dissidents et la répression des manifestations étudiantes sont autant de signes qui montrent que le régime se prépare à une nouvelle vague de troubles majeurs.