De CLAUDE SALHANI, UPI, Rédacteur en chef international
AUVERS-SUR-OISE, France, (UPI) Maryam Radjavi, leader charismatique de lopposition iranienne, le Conseil national de la Résistance iranienne, dont lénigmatique Moudjahidine du peuple (OMPI) a été accusé de tout (de terrorisme, de marxisme et même dêtre une secte secrète), nous parle de lOMPI, de la situation en Iran et de lavenir de son pays dans une interview exclusive avec Claude Salhani, Rédacteur en chef international chez United Press International. Linterview a eu lieu chez elle, à Auvers-sur-Oise. Voici quelques extraits dune longue conversation avec Maryam Radjavi, officiellement présidente élue du CNRI.
United Press International : Vous luttez depuis longtemps pour que lOMPI soit retirée de la liste du terrorisme des Etats-Unis et de lUnion Européenne. Que pourriez-vous accomplir de plus si lOMPI était retirée de ces listes ?
RADJAVI : La présence de lOMPI sur la liste de la terreur est le résultat de la politique de complaisance des gouvernements occidentaux vis-à-vis du régime des mollahs. Pour les mollahs, taxer lOMPI dorganisation terroriste a fait passer un message aux Iraniens. Celui quils ne devraient même pas avoir le droit de penser à la liberté, ni à la démocratie dans leur pays parce quils soutiennent une dictature, parce que même lEurope est derrière les mollahs. Cette politique a totalement échoué.
UPI : Que pensez-vous du fait que lOccident donne aux mollahs presque tout ce quils veulent dans les négociations nucléaires ?
RADJAVI : Ces concessions encouragent le régime des mollahs. Elles intensifient leur arrogance. Cest le résultat de la politique des gouvernements occidentaux. Il ny a aucune volonté en Occident de sopposer à leur attitude, donc ils continuent de faire du chantage, de proférer des menaces et dimposer leur volonté à la communauté internationale. Cest comme ça quils le voient. Et cest une grande erreur de calcul de lOccident. Les mollahs sont incapables de réforme. Ils profitent des erreurs de lOccident. Alors imaginez le jour où les mollahs auront des armes nucléaires.
UPI : Imaginions que vous soyez au pouvoir, que feriez-vous des mollahs ?
RADJAVI : Le Conseil national de la Résistance iranienne a déjà annoncé sa position et son programme. Le CNRI a lintention dorganiser des élections libres dans les six mois. Une des missions premières après le renversement (du régime) sera de dissoudre tous les organes répressifs, dont les soi-disant tribunaux de la charia. La liberté des femmes sera appliquée. Actuellement, la société iranienne est privée de ses droits les plus élémentaires. Nous élaboreront une nouvelle constitution et il y aura la séparation de lEglise et de lEtat. Les dirigeants du régime des mollahs doivent être jugés dans un tribunal international pour les crimes quils ont commis contre lhumanité.
UPI : Comment vous voyez-vous arriver au pouvoir ?
RADJAVI : Nous pensons que la résistance iranienne a tous les ingrédients (pour diriger). Nous avons le soutien du peuple. Plus de 120.000 de nos partisans ont été exécutés. Ils venaient de toutes les couches de la société, ce qui montre la base populaire de la résistance. Dun autre côté, la résistance iranienne a un réseau bien organisé à lintérieur du pays, qui organise en ce moment même des manifestations contre le gouvernement. De plus, nous avons une force concentrée et bien organisée le long de la frontière Iran-Irak, attendant le bon moment pour briser le climat de répression en Iran. Enfin, nous avons un réseau de renseignement à lintérieur du pays, qui a déjà fait ses preuves. (Cest lOMPI qui a la première tiré la sonnette dalarme sur les ambitions nucléaires de la république islamique.)
UPI : Vous attendez-vous à un mouvement de pression venant de lintérieur ou de lextérieur du pays pour renverser le régime ?
RADJAVI : La résistance iranienne et le peuple utiliseront leurs ressources, mais la réalité cest quactuellement, la pression que les pays européens et les Etats-Unis exercent sur la résistance donne aux mollahs une justification pour exécuter les membres de la résistance en disant quil sagit de « terroristes ». Si les gouvernements étrangers cessaient daider ce régime, les Iraniens et leur Résistance seraient capables de le renverser. De plus Je dois ajouter que cette résistance est lantithèse de lintégrisme islamique.
UPI : Admettons que lIran obtienne des armes de destruction massive et que vous deveniez chef de lEtat. Seriez-vous disposée à les abandonner ?
RADJAVI : Nous ne voulons pas dun Iran nucléaire car ce nest pas dans lintérêt des Iraniens. Comme vous le savez, lIran est un pays très riche. Il a du gaz, du pétrole et beaucoup dautres ressources. Donc, même dun point de vue économique, il est inutile de dépenser dans le secteur de lénergie nucléaire. Malgré toutes ces ressources, 80 % des Iraniens vivent en dessous du seuil de pauvreté. Et ça, cest vraiment une tragédie.
UPI : Si vous étiez au pouvoir, quelle serait votre politique vis-à-vis de lIrak ?
RADJAVI : Le CNRI a déclaré que sa politique étrangère était basée sur lamitié et la non ingérence dans les affaires internes des autres pays. Concernant lIrak, il faut dire que pendant que le régime iranien intervient largement dans les affaires de lIrak, les Irakiens subissent eux aussi la pression du régime iranien.
UPI : Quels seraient les tout premiers changements que vous mèneriez ?
RADJAVI : Nous avons dit que la première des choses serait dorganiser des élections libres.
UPI : Vous et les membres de votre organisation ont été accusés à plusieurs reprises dêtre un groupe marxiste, une secte ou une société secrète.
RADJAVI : Cette étiquette a été utilisée par le chah pour ternir la popularité des Moudjahidine parmi les Iraniens. Et Khomeiny sen est servi dans le même but. Sinon, comment pourraient-ils justifier quils prônent le véritable islam ?
UPI : Comment vous décririez-vous, vous et votre mouvement ?
RADJAVI : A mes yeux, notre mouvement est une force profondément démocratique, musulmane et éprise de liberté. Nous croyons dans la liberté sociale et sommes radicalement opposés à lintégrisme islamique.
UPI : Quelle est donc la place des non Musulmans en Iran ?
RADJAVI : La religion est une affaire personnelle et fait partie de la liberté individuelle. Le fait dappartenir à telle religion nest pas mieux que dappartenir à une autre. LIslam est la religion de lémancipation, de la clémence, de légalité, de lespoir et de la fraternité.
UPI : Vous avez combattu le chah. Votre mouvement a combattu le chah. Pourriez-vous vous allier à son fils ? Voyez-vous un quelconque rôle futur pour le fils du chah ?
RADJAVI : La monarchie appartient au passé. Les Iraniens ont clairement exprimé leur point de vue. Les Iraniens veulent la liberté et sont contre toutes les formes de dictature.
UPI : En dépit du profond mépris de millions dIraniens pour les mollahs, comment expliquez-vous la stabilité du régime et le fait quil est au pouvoir depuis 27 ans, depuis la révolution ?
RADJAVI : Grâce à la répression absolue et à lexportation du terrorisme. Ils continuent dexécuter des familles entières. Ils ont besoin de créer ce climat de peur et de répression. Malheureusement, cest le soutien de lOccident qui a renforcé ce régime.
UPI : Le Premier ministre israélien Ehud Olmert a bien fait comprendre il y a quelques jours à Petra, en Jordanie, que lIran ne serait pas autorisé à obtenir des armes nucléaires. Supposons quIsraël frappe lIran, quelles en seraient les conséquences selon vous ?
RADJAVI : La solution à la crise nucléaire ne réside pas dans une intervention militaire étrangère, ni dans la politique de complaisance, mais dans ce que nous appelons la troisième voie (soutenir la résistance).
UPI : Pensez-vous quune frappe dIsraël et/ou des Etats-Unis renforcerait encore le régime de Téhéran ?
RADJAVI : Non. Je pense que les Iraniens ne soutiennent aucunement ce régime, sauf un petit groupe comme les gardiens de la révolution, mais pas le peuple.
UPI : Pensez-vous que les USA vont jouer un rôle majeur dans la région ?
RADJAVI : Je pense que les Etats-Unis ont un rôle important à jouer en adoptant une politique ferme. Sils nadoptent pas une politique de fermeté vis-à-vis du régime des mollahs, alors ils doivent livrer lIrak aux mains des mollahs. Et cela entraînera dautres pays de la région.
UPI : Considérez-vous lAmérique comme un catalyseur dans la région ?
RADJAVI : La politique de complaisance aide les mollahs à survivre. Les Etats-Unis ont réellement rendu un grand service au régime.
UPI : Si vous aviez un message à faire passer au président Bush, quel serait-il ?
RADJAVI : Il est nécessaire dêtre ferme avec le régime des mollahs. Et dappliquer cette fermeté, pas seulement den parler, mais de la mettre en pratique. Et découter la voix des Iraniens.
UPI : Et si le président Bush vous disait « concrètement, que puis-je faire pour vous aider ? »
RADJAVI : Imposez des sanctions diplomatiques, économiques et des sanctions sur le pétrole. Isolez les mollahs. Faites quelque chose qui montre aux mollahs la détermination des Etats-Unis et des pays occidentaux, et immédiatement après reconnaissez la résistance iranienne et le peuple dIran. Le reste, la résistance peut le faire toute seule.
UPI : Les Etats-Unis sont-ils en train de faire la même erreur avec Ahmadinejad quavec Khomeiny ?
RADJAVI : Absolument.