
La Semaine l’Allier : Par François Colcombet – L’Iran est, apparemment, devenu fréquentable. La signature d’un projet de règlement du dossier nucléaire, le soutien des USA et de la Russie (beau doublé!), la participation enfin à la lutte contre Daesh en Irak, tout cela a fait de l’Iran un participant apprécié et écouté à la récente réunion de Vienne sur la Syrie.
D’ailleurs avant même la très prochaine visite du président Rohani à Paris (le 16 novembre) où il a été invité par notre président de la république, le Tout-Paris bancaire industriel et politique s’est bousculée à Téhéran. Monsieur Fabius en personne s’y est rendu ainsi que, pour la commission des lois de l’Assemblée nationale, Madame Guigou ou encore, pour l’Auvergne, Madame Odile Saugue.
Certes ces dames, qui ont dû se coiffer d’un foulard pour être admises au parlement iranien, ne sont pas tombées de la dernière pluie et elles nous assurent qu’elles savent très bien ce qu’il en est de la réalité des droits de l’homme dans ce pays.
Elles savent ainsi que l’actuel régime iranien s’est installé par la terreur : quelques 100 personnes exécutées par jour en 1981. Plus de 30 000 prisonniers tués pendant l’été 1988. Elles savent aussi qu’en vitesse de croisière, si l’on peut dire, l’Iran conserve une sorte de record : ce pays bat la Chine et tous les autres pays pour le nombre d’exécutions capitales par rapport au chiffre de la population. Et ce nombre d’exécutions n’a pas, contrairement à ce qu’on aurait pu espérer, diminué depuis l’arrivée au pouvoir de Monsieur Rohani.
Bien au contraire. Son gouvernement a d’ailleurs pris soin de dire expressément et de faire comprendre, par une recrudescence des mises à mort, que la signature d’un accord sur le nucléaire ne concernait pas les libertés individuelles ou collectives…
Monsieur Rohani, interrogé par ses visiteurs comme sans doute ont dû le faire Monsieur Fabius, Madame Guigou et consorts, a dit qu’il n’y pouvait rien et qu’en Iran les juges sont indépendants. Sauf que le ministre qu’il a choisi pour s’occuper du portefeuille de la justice est un certain Mostafa Pourmohammadi lequel n’était autre qu’un des trois membres du comité qui a autorisé au cas par cas les quelque 30 000 exécutions politiques de 1988.
Sauf que, apparemment, aucun des récents condamnés à mort n’a bénéficié d’une mesure de grâce. Sauf que même les gamins qui ont été condamnés pour des faits commis après l’âge de la puberté qui est de 15 ans pour les garçons et de huit ans et huit mois lunaires révolus pour les filles, peuvent être et sont souvent condamnés à mort.
Il est vrai qu’en général on attend pour exécuter cette sentence, qu’ils aient atteint leurs 18 ans (âge de la majorité retenue dans les conventions internationales sur les droits de l’enfant qui ont été signées par l’Iran). Parmi les faits qui peuvent valoir pareille sanction figurent de nombreuses infractions en matière de drogue ou de blasphème religieux.
Elles offrent certainement au juge iranien une marge d’appréciation dont eux du moins, ne font pas un usage laxiste ! C’est le moins qu’on puisse dire à voir les statistiques. Celles du moins qui sont connues (car les autorités iraniennes reconnaissent garder le secret sur l’ampleur véritable de ces exécutions afin « d’atténuer les critiques internationales ».)
Ce bilan serait, même pour des parlementaires chevronnés qui par définition ont le cœur bien accroché, un peu désespérant, s’il n’y avait, tout de même, quelques progrès dont nos représentants en Iran auront sans doute pu avoir connaissance. Certes les pendaisons sont toujours exécutées avec une sage lenteur au bout de grues qui s’élèvent lentement dans le ciel.
Certes les énucléations (car comme de bien entendu on continue d’arracher les yeux comme l’exige la charia) sont faites sans anesthésie, comme les lapidations ou les crucifixions. Mais pour les amputations (de doigts, de mains ou de jambes…) a été mise au point une machine spéciale une sorte de guillotine à mains. Ce qui montre qu’en Iran on n’arrête pas le progrès.