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Une délégation du Congrès américain déclenche une bombe politique en Irak

Par Roy Gutman

McClatchy Newspapers, Bagdad, 11 juin – L’ambassade américaine en Irak a pris samedi ses distances de la très controversée « mission d’enquête » à Bagdad dirigée par le représentant Dana Rohrabacher, un républicain de Californie, qui a poussé l’Irak à demander que toute la délégation du Congrès quitte le pays.

Lors d’une réunion qui a duré une heure et 40 minutes vendredi avec le Premier ministre Nouri al-Maliki, Rohrabacher a informé le dirigeant irakien que sa sous-commission de la Chambre étudiait le massacre en avril et en Irak de 35 opposants iraniens par les troupes irakiennes.
C’est après que Rohrabacher a annoncé son enquête à la presse, qu’al-Maliki, qui est actuellement ministre par intérim de la défense et commandant en chef, semble avoir pété les plombs.

Rohrabacher, un conservateur d’Orange County et président de la sous-commission des affaires étrangères de la Chambre chargée de la surveillance et des enquêtes, a déclaré plus tard aux journalistes que le « massacre » était probablement un crime contre l’humanité.

Rohrabacher a également demandé à l’Irak d’envisager à un stade ultérieur le remboursement d’une partie des coûts de l’invasion américaine de 2003 et de l’occupation qui a suivi. Le porte-parole du gouvernement irakien a répondu publiquement que l’Irak ne paierait pas « un centime ».

L’ambassade américaine a publié un communiqué expliquant que le Congrès est une branche distincte du gouvernement dont les membres sont souvent en désaccord avec l’exécutif. Elle a dit qu’il était important que les membres du Congrès rencontrent et échangent avec les dirigeants irakiens, « même lorsqu’il y a des désaccords ».

Le porte-parole de l’ambassade David Ranz a noté que les visiteurs du Congrès « ne reflètent pas nécessairement l’opinion de l’administration américaine ou même de la majorité du Congrès. »
 
Rohrabacher, le Représentant Russ Carnahan du Missouri – qui est la plus haute figure démocrate de la sous-commission de Rohrabacher – et quatre autres membres de la délégation étaient déjà sur le chemin du retour vendredi soir, lorsque le gouvernement irakien a annoncé qu’il leur avait demandé de quitter le pays. Il semble que l’appel téléphonique par un membre du gouvernement irakien à l’ambassade américaine a également été passé à ce moment.

Parmi les autres membres de la délégation, il y avait les représentants républicains Ted Poe du Texas, qui est également membre de la sous-commission de Rohrabacher, Jeff Duncan de Caroline du Sud et Louie Gohmert du Texas, ainsi que le représentant démocrate Jim Costa de Californie.

Rohrabacher a dit au site McClatchy samedi qu’il n’avait pas pointé du doigt la responsabilité de Maliki, qui était le chef des forces armées au moment de la tuerie. « Si le Premier ministre s’est senti coupable à ce propos, pour une raison quelconque, c’est son affaire. Nous n’avons rien dit qui l’impliquait », a déclaré Rohrabacher dans un entretien téléphonique depuis Istanbul en Turquie. « Nous avons dit que le massacre de tant de civils est un crime, et nous avions besoin de nous assurer que ses responsables rendraient des comptes. »
 
Ceux qui ont été tués étaient des membres des Moudjahidine du peuple d’Iran, ou OMPI, un groupe militant iranien qui a combattu l’Iran sous Saddam Hussein et s’est retrouvé bloqué en Irak après le renversement du dictateur par les Etats-Unis. Les États-Unis ont classé l’OMPI comme un groupe terroriste depuis plus d’une décennie.

Rohrabacher a déclaré qu’il pensait que la personne responsable du massacre pourrait être un colonel qui commandait  les troupes sur le terrain à l’époque. Il a dit que si Maliki avait dit à ses subordonnés de dire à leurs troupes de ne pas rester en arrière et d’ouvrir le feu, même si c’était contre des civils désarmés, « alors il serait coupable. Sinon, il ne l’est pas ».

Rohrabacher a déclaré qu’il n’avait aucun regret pour ce qu’il avait dit et qu’il ne publierait pas d’excuses.

L’Irak veut que d’autres pays accueillent les plus de 3400 membres de l’OMPI désormais confortablement installés au camp d’Achraf, au nord de Bagdad et à proximité de la frontière iranienne. Rohrabacher a convenu que serait la meilleure des choses, mais il a dit qu’il ne voulait pas que les États-Unis ouvrent leurs portes.

«Je ne pense pas que les États-Unis devraient accueillir quiconque se trouve en difficulté », avait-il déclaré dans une interview téléphonique à McClatchy un peu plus tôt.

Carnahan n’a pas répondu aux demandes d’interview, mais a publié un communiqué qui contournait toute critique de l’enquête de Rohrabacher. « Les informations d’avril  dernier sur les affrontements meurtriers et autres actes de violence contre les résidents d’Achraf sont très inquiétantes », a-t-il dit. «J’encourage le gouvernement irakien à mener rapidement  une enquête approfondie sur cet incident. »

La présidente de la commission des Affaires étrangères au complet de la Chambre, la représentante Ileana Ros-Lehtinen, une républicaine de Floride, n’a pas non plus de problème avec la mission.

« Les membres du Congrès des deux partis, moi y compris, ont, depuis un certain temps, fait part de leurs préoccupations au Département d’Etat sur le bien-être des résidents du camp d’Achraf en Irak et les actions récentes des autorités irakiennes contre les résidents du camp », a-t-elle a déclaré dans un communiqué.