Lors d’une réunion avec le Premier ministre irakien Mohammed Al-Sudani, Ali Khamenei a appelé au renforcement des Forces de mobilisation populaire irakiennes (Hashd al-Shaabi), malgré la pression internationale croissante pour démanteler les milices soutenues par Téhéran en Irak. « Hashd al-Shaabi est l’un des éléments clés du pouvoir en Irak qui doit être préservé et renforcé », a déclaré Khamenei lors de la réunion à Téhéran le 8 janvier.
Khamenei a également accusé les États-Unis de chercher à étendre leur influence en Irak, avertissant : « Les preuves suggèrent que les Américains travaillent à consolider leur présence en Irak. Il faut résister à cela. »
Les commentaires du Guide suprême surviennent alors que l’Irak fait face à des demandes croissantes de contrôle et de démantèlement des milices pro-iraniennes suite à l’effondrement du régime de Bachar al-Assad en Syrie et à l’affaiblissement du Hezbollah au Liban. Ces développements ont ébranlé les fondements de « l’Axe de la Résistance » de Téhéran, laissant nombre de ses mandataires désemparés. Les puissances occidentales, les États-Unis en tête, ont menacé d’une action militaire contre les milices irakiennes si Bagdad ne se conformait pas aux exigences de leur désarmement.
L’intégration ou la dissolution de ces milices est devenue un point central en Irak, le Premier ministre Al-Sudani étant soumis à une pression importante pour équilibrer les intérêts nationaux et les exigences internationales. Ibrahim Al-Sumaidaie, conseiller du Premier ministre irakien, a récemment déclaré à la télévision nationale : « L’Irak ne doit plus être lié à l’« Axe de la Résistance » après la chute d’Assad et l’affaiblissement du Hezbollah. Nous devons dissoudre ces factions ou risquer de nous voir imposer cela par la force. »
La rhétorique de Khamenei reflète un régime en mode défensif, cherchant à rallier ses alliés restants malgré des pertes importantes. Les analystes politiques suggèrent que Téhéran est réticent à abandonner son influence sur les factions armées en Irak, les considérant comme essentielles à sa stratégie régionale. Esmail Qaani, commandant de la Force Al-Qods du CGRI, s’est rendu récemment à Bagdad pour discuter de la situation et a peut-être proposé des mesures partielles pour restructurer plutôt que de dissoudre complètement ces groupes.
Masoud Pezeshkian, le président du régime, a adopté un ton sensiblement plus doux lors de la visite d’Al-Sudani, mettant l’accent sur la coopération et la sécurité régionales. « Les deux pays partagent des préoccupations concernant la stabilité en Syrie, la préservation de l’intégrité territoriale et la lutte contre le terrorisme », a déclaré Pezeshkian lors d’une conférence de presse conjointe. Cette disparité entre l’appel de Khamenei à « la jeunesse syrienne pour reprendre possession de ses terres » et les remarques conciliantes de Pezeshkian met en évidence la lutte interne du régime pour projeter sa force tout en faisant face aux retombées de ses pertes stratégiques.
Les demandes de démantèlement des milices comme Hashd al-Shaabi s’inscrivent dans le cadre des efforts internationaux plus vastes visant à limiter l’influence de Téhéran dans la région. L’effondrement du régime d’Assad a considérablement réduit la capacité de Téhéran à projeter sa puissance au Moyen-Orient. Les milices irakiennes, longtemps considérées comme le point d’appui de Téhéran à Bagdad, sont désormais sous surveillance. Dans le même temps, les factions soutenues par l’Iran ont cessé leurs attaques transfrontalières contre Israël, laissant les Houthis au Yémen comme la dernière force mandataire ouvertement active de Téhéran.
En réponse à ces pressions, Khamenei a cherché à réaffirmer le rôle de l’Iran en Irak, décrivant les milices comme « la clé de la souveraineté et de la force de l’Irak ». Cependant, les analystes soutiennent que cette stratégie expose la position précaire du régime.
La rencontre de Khamenei avec Al-Sudani souligne la détermination de Téhéran à maintenir son influence en Irak, même si ses mandataires régionaux vacillent. Cependant, les appels de plus en plus virulents des dirigeants irakiens à s’éloigner de l’« axe de la résistance » reflètent une dynamique régionale en mutation. Avec la chute d’Assad et l’affaiblissement du Hezbollah, l’avenir du réseau de mandataires de l’Iran semble incertain, ce qui marque un tournant pour Téhéran et Bagdad dans leur évolution vers le nouveau paysage du Moyen-Orient.