DEdmund Blair
Reuterst Derrière les portes de Tebed Spinning Company dans cette ville industrielle située à louest de la capitale iranienne, un groupe de travailleurs licenciés se plaint que la promesse du président de combattre le chômage nait pas sauvé leurs emplois.
Mohammad Bozorgi Alamouti et ses collègues, licenciés il y a trois mois, ont écouté avec beaucoup dattention le discours du président Mahmoud Ahmadinejad dans la ville en juin, faisant part des promesses habituelles de protéger les droits des salariés et de relancer léconomie.
Mais les travailleurs affirment que leurs employeurs ny ont prêté aucune attention.
« Le président a eu de belles paroles mais quasiment rien na été accompli. Le gouvernement, les hauts responsables, les patrons ne lécoutent pas », a expliqué Alamuti devant lusine, attendant que les cadres de la société entrent oui sortent pour plaider sa cause.
Le président fait la une des médias dans louest pour son attitude de défi dans le conflit autour de son programme nucléaire. Mais ce qui intéresse vraiment les Iraniens comme Alamuti, cest de savoir sil va tenir ses promesses économiques.
Ahmadinejad a pris le pouvoir lannée dernière de lEtat islamique jurant de distribuer de manière plus équitable les revenus du pétrole, message quil répète régulièrement à chaque rassemblement. Mais plusieurs économistes affirment que sa politique ne fonctionne pas.
Le quatrième producteur mondial de pétrole récolte peut-être des bénéfices exceptionnels, mais les économistes disent que le gouvernement fait monter linflation en renflouant léconomie en pétrodollars et en minant le secteur privé avec une politique interventionniste.
« A lheure actuelle, il y a de grandes chances pour que les conditions économiques empirent, tandis que les attentes de la population sont de plus en plus grandes en raison des slogans du gouvernement sur laide sociale », ont écrit 50 économistes dans une lettre formulée sans ménagements en juin.
RISQUE DINFLATION
« Si le gouvernement ne tient pas ses promesses, la confiance de la population dans le gouvernement va disparaître et, face aux menaces internationales, notre sécurité nationale sera en danger », selon les économistes, la plupart étant des professeurs duniversité.
Les syndicats existent en Iran mais leur pouvoir est limité et les autorités étouffent rapidement les protestations sur les conditions de vie.
Mais même si tous les travailleurs ne descendront pas dans la rue si Ahmadinejad nest pas à la hauteur, certains experts pensent que cette déception se ressentira lors des prochaines élections.
Les auteurs de la lettre ont également avancé que les hauts responsables étaient nommés sans porter une attention réelle à leurs qualifications et se sont plaints de la médiocrité de la gestion du budget. Certains critiques affirment quAhmadinejad, révolutionnaire pieux, réservent certains fonds à des organismes conservateurs religieux.
Un des principaux sujets de préoccupation des auteurs est une éventuelle poussée de linflation, qui se situe actuellement autour de 10 pourcent.
Les économistes et la banque centrale affirment que le gouvernement fait grimper linflation en puisant dans un fonds en dollar venant du pétrole destiné à des investissements ou à des urgences budgétaires en cas de problèmes mais qui est utilisé actuellement pour des dépenses en dépit des prix élevés du pétrole.
« Linflation finit toujours par nuire à la population que le nouveau président tente daider. Cest un populiste mais si linflation décolle, il ne sera plus très populaire », a déclaré Richard Fox, directeur à Fitch Ratings à Londres.
Laugmentation des prix est un sujet de plainte commun. Au marché de Qazvin, ville située près dAlborz, le marchand Ali Akbar Mohammadi, qui a voté pour Ahmadinejad, disent que les prix élevés nuisent à son chiffre daffaires.
« Les gens nont pas assez dargent et les choses sont devenues chères », selon Mohammadi, 60 ans, se tenant derrière une roulotte bringuebalante où il vend des sandwiches. « Les promesses (dAhmadinejad) étaient belles, mais jusquà maintenant, nous navons vu aucun résultat. »
La banque centrale na quun pouvoir limité sur le contrôle des prix. Elle a besoin de laccord du parlement pour émettre de largent et absorber la liquidité et, en avril, elle a reçu lordre des députés de baisser les taux de prêt afin de les faire passer à un nombre à un chiffre avant 2010 malgré les avertissements de risque dinflation.
LINVESTISSEMENT SOUFFRE
Le gouvernement reproche aux sociétés de chercher à faire des bénéfices excessifs. Les sociétés répondent quelles doivent faire face à de nouvelles dépenses, dont une hausse de plus de 20 pourcent du salaire minimum, soit plus de 160$. Ce chiffre augmente en fonction de lexpérience et de la profession en question.
Certaines compagnies ont licencié des salariés en raison de cette hausse et affirment que la concurrence avec les firmes étrangères est de plus en plus difficile.
« Notre industrie nest pas en concurrence avec la Chine dans le domaine de la technologie mais dans le domaine des coûts de travail » », a affirmé Siamak Namazi, directeur général de Atieh Bahar Consulting à Téhéran.
Chez Tebed Spinning Company à Alborz, la direction annonce avoir licencié temporairement environ un tiers de ses 400 travailleurs, pendant quelle installe de nouveaux équipements afin de rivaliser avec les importations chinoises. Alamouti et ses amis craignent que leurs postes naient disparu pour de bon.
Les économistes affirment que les sociétés iraniennes hésitent beaucoup à investir dans ce quelles considèrent comme un environnement politique imprévisible. Ceci ralentit la création demplois dans un pays où le taux de chômage officiel tourne autour de 12 pourcent. Les estimations non officielles sont beaucoup plus élevées.
Un grand nombre dinvestisseurs étrangers restent aussi à lécart de peur que le conflit nucléaire avec lOccident ne prenne de trop grandes proportions et mène à des sanctions de lONU, mesure que menacent de prendre les Etats-Unis et les Européens.
« Linvestissement occidental en a forcément souffert », selon Namazi.
Pour lheure, les économistes déclarent quAhmadinejad et son gouvernement détiennent une réserve de fonds suffisante pour combler le trou de linvestissement. La banque centrale par exemple, prête des devises étrangères aux sociétés iraniennes important des produits lorsquelles ne peuvent pas trouver de créanciers.
Mais, même avec ses revenus exceptionnels du pétrole, la croissance économique de 5,4 pourcent de lannée jusquen mars était moins élevée que prévu.
Alamouti et les autres partisans dAhmadinejad attendent toujours les jours meilleurs que le président a promis.