jeudi, mars 28, 2024

La résistance continue

Le 26 juin, au stade de Taverny (France), 100.000 Iraniens et sympathisants de la Résistance se rassemblent autour de Maryam RadjaviIran : Un an après le soulèvement populaire qui a embrasé le pays et été durement réprimé, les manifestations marquant l’événement se sont multipliées. Prouvant que le régime, plus que jamais divisé, n’a jamais réussi à étouffer la contestation.

Par Jean Levert

Afrique Asie, juillet 2010 – 12juin 2010. Premier anniversaire du soulèvement populaire qui a suivi les élections truquées de 2009, et une nouvelle occasion pour les Iraniens de descendre dans la rue afin de prouver leur persévérance dans la résistance. Ces protestations marquent l’échec du régime religieux dans sa tentative d’étouffer la flamme qui illumine l’Iran depuis douze mois, malgré les mesures répressives.

Le 26 juin, au stade de Taverny (France), 100.000 Iraniens et sympathisants de la Résistance se rassemblent autour de Maryam RadjaviIran : Un an après le soulèvement populaire qui a embrasé le pays et été durement réprimé, les manifestations marquant l’événement se sont multipliées. Prouvant que le régime, plus que jamais divisé, n’a jamais réussi à étouffer la contestation.

Par Jean Levert

Afrique Asie, juillet 2010 12juin 2010. Premier anniversaire du soulèvement populaire qui a suivi les élections truquées de 2009, et une nouvelle occasion pour les Iraniens de descendre dans la rue afin de prouver leur persévérance dans la résistance. Ces protestations marquent l’échec du régime religieux dans sa tentative d’étouffer la flamme qui illumine l’Iran depuis douze mois, malgré les mesures répressives.

Peuple contre mollahs

Ce jour-là, à Téhéran, les heurts entre les manifestants et les forces de répression ont duré plus de huit heures. L’avenue Enghelab (« Révolution ») jusqu’à l’avenue Azadi (« Liberté »), trajet traditionnel des manifestations antigouvernementales, a constitué l’axe principal des affrontements. Des heurts ont également été rapportés ailleurs dans la ville, sur les campus des universités de Téhéran, Charif et Honar. Des manifestations ont également touché les villes de province.

Selon des témoins, les manifestants ont repoussé l’assaut des forces de sécurité et des Gardiens de la révolution (Pasdaran) qui ont dû battre en retraite dans au moins quatre points de la capitale. Des hommes de la brigade antiémeutes, qui refusaient d’affronter les manifestants, ont été arrêtés par des agents en civil (lebasse chakhsi). Dans le centre, des jeunes ont affronté des bassidji (milices paramilitaires pro-gouvernementales) et des gardes spéciaux aux cris de « Mort à Khamenei ! » et « Mort au dictateur ! ». Ces heurts se sont poursuivis tard dans la soirée.

D’après le commandant en chef des Forces de sécurité de Téhéran, quatre-vingt-onze manifestants ont été arrêtés. Le gouverneur général de la capitale, de son côté, a affirmé que des membres de l’opposition des Moudjahidine se trouvaient parmi les interpellés. Mais d’autres informations font état de 400 à 900 arrestations, dont une centaine de femmes, qui ont été transférées à la prison d’Evine.

Certains estiment que le soulèvement est en perte de vitesse et que le régime a repris la situation en main. Pourtant, le mouvement se poursuit bel et bien. Les manifestants ont pu créer de multiples accrochages malgré un quadrillage policier très serré. Le régime avait déployé le gros de ses forces, notamment dix brigades de combat, 150 bataillons « Achoura » des Pasdaran et de la force Bassidj, 94 commissariats de police et diverses forces.

Depuis le 12 juin 2009, on dénombre une quinzaine de manifestations. Les gens, organisés en petits groupes, affrontent les forces du régime à plusieurs endroits en utilisant des méthodes astucieuses. Ces accrochages montrent que le régime n’a pas réussi à contrôler les manifestations.

L’an dernier, l’apparition d’une brèche au sommet du pouvoir avait déclenché les manifestations. Une faction entière du pouvoir avait été éjectée. Mais c’est avant tout l’autorité du guide suprême qui a été irrémédiablement entamée, notamment auprès de ses propres forces. S’il a réussi à réduire la faction rivale à l'inaction, il a néanmoins échoué dans ses tentatives de l’absorber ou de l’éliminer totalement.

Lors des cérémonies de l’anniversaire de la mort de Khomeiny, qui devaient symboliser l’unité retrouvée des deux factions, les deux camps n’ont pas hésité à se déchirer sous l’œil des caméras pour s’emparer de la tribune. Les partisans de Khamenei ont empêché le petit-fils de Khomeiny, proche de la faction rivale, de prendre la parole. Dans son discours, Khamenei a comparé implicitement Hachemi-Rafsandjani, le président du Conseil de discernement des intérêts du régime, à un disciple du Prophète qui l’avait trahi.

Le lendemain, un parlementaire, fils de Morteza Mottahari, un des théoriciens du régime assassiné en 1979, comparait Khamenei à l’un des assassins de l’Imam Hossein très vénéré des chiites. Tous les indicateurs montrent que Khamenei ne peut désormais compter que sur le soutien du Corps des Pasdaran.

Parallèlement, ses efforts pour faire plier la communauté internationale par la surenchère, le chantage et l’exportation de la révolution ont échoué, et son plan pour gagner du temps dans le dossier nucléaire, en impliquant le Brésil et la Turquie, est tombé à l’eau. La résolution du Conseil de sécurité de l’Onu sur de nouvelles sanctions porte un coup sérieux à son autorité, car elle met en évidence l’isolement international du régime. En revanche, elle est porteuse d’espoir pour le peuple iranien qui y voit le signe d’un éventuel renoncement à la politique de complaisance internationale à l’égard du régime.

La situation de la faction vaincue n’est guère brillante. Moussavi et Karroubi ont retiré leur appel aux manifestations du 12 juin, en invoquant leur souci de « ne pas mettre en danger des vies et des biens ». Selon un opposant, Moussavi agit désormais comme un frein et non comme un leader du mouvement contestataire. Beaucoup dénoncent ce revirement, perçu comme le souci de « ne pas mettre en danger la vie et les biens des oppresseurs ». Moussavi est plus respectueux des lignes rouges tracées par Khamenei, en soutenant aussi bien la Constitution du régime que le principe de Velayat-e Faghih (la tutelle du guide religieux). Il a même abandonné ses positions initiales sur les fraudes électorales et l’illégitimité du gouvernement d’Ahmadinejad.

Conséquence : une grande partie de la population dont la jeunesse, fer de lance de l’insurrection, pense qu’aucune réforme n’est possible de l’intérieur du régime, et que le mouvement a besoin d’un leadership qui lui soit propre.

De plus en plus de contestataires songent à renverser totalement le régime. Partout dans le pays, des affiches et des brochures de soutien aux Moudjahidine et à Achraf ont fait leur apparition. La jeunesse accueille de plus en plus favorablement les positions des Moudjahidine du peuple et Achraf apparaît davantage comme une ville symbole et source d’inspiration pour la résistance.

Une situation très alarmante pour le pouvoir. Pendant trois décennies, la théocratie a tenté d'anéantir les structures et la base sociale de l'Organisation des Moudjahidine du peuple iranien (Ompi) par une répression hors du commun. Pour Khomeiny, il était vital de faire disparaître leur vision radicalement différente de l'islam. Leur popularité signe l'échec du pouvoir. La classe moyenne citadine qui, à l'étranger, soutient activement ce mouvement, traduit l'influence de l'Ompi dans cette catégorie sociale, moteur des grands mouvements historiques contemporains en Iran. Ce n'est pas sans raison que le régime concentre son dispositif répressif sur les réseaux des Moudjahidine.

Vaines propagandes

Le régime des mollahs a accentué sa campagne de diffamation contre la Résistance. Le mollah Moslehi, ministre des Renseignements du régime (Vevak), a diffusé, le 15 juin, une série de propagandes démentie par l'Ompi. Il a prétendu avoir arrêté « deux équipes » venues d'Irak, avec le soutien de l'Angleterre,
de la Suède et de la France, qui prévoyaient selon lui de « commettre des attentats à la bombe sur plusieurs places de Téhéran ». La télévision du régime a même diffusé un film pour imputer la mort de la jeune Neda, lors des manifestations de 2009, à l'Ompi. Sans pouvoir convaincre ses partisans.

Des centaines d’arrestations ont été effectuées dans ces milieux en quelques mois, culminant avec la confirmation définitive de six peines de mort pour des parents de résidents d'Achraf. Khamenei s’efforce d’accentuer la pression sur cette ville, sise en territoire irakien. Il cherche, par le biais du gouvernement moribond de Nouri al-Maleki, à anéantir la cité dans le sillage du retrait des troupes américaines d’Irak. Cette année encore, le grand rassemblement des Iraniens près de Paris autour de Maryam Radjavi, chef charismatique du mouvement, en solidarité avec Achraf, a été une démonstration de force et de popularité de la Résistance iranienne. Un retour au passé n’est plus possible. Mais le changement, oui. Il faut s’en donner les moyens.