Par Mohammad Amine*
CNRI – « Bonjour, je suis la fille dAli Reza Akbari, mon papa est instituteur. Il est en prison. Moi je croyais que la prison cétait pour les méchants, mais maintenant je sais que cest pour les instituteurs. Ça fait vingt jours que je nai pas vu mon papa, que je ne lai pas entendu. Vingt jours que je nai aucune nouvelle, que je ne sais pas ce quil fait, à quoi il pense. Moi jaimerais juste lui parler un tout petit peu,je voudrais lentendre me dire quil va bien, seulement ça, oui, seulement ça ! »
Quand le 2 mai, Ellaheh, 10 ans, a lu ces phrases dans un rassemblement denseignants protestataires à Téhéran, des milliers dentre eux avaient les larmes aux yeux. A cause de linnocence de cette enfant, à cause des humiliations et de la violence émanant des mollahs, à cause des licenciements et des arrestations.
La libération de leurs collègues arrêtés est en tête des priorités des enseignants protestataires en Iran aujourdhui. Mais leur mouvement a commencé à cause de leurs salaires misérables et des discriminations qui les touchent par rapport aux autres fonctionnaires. Cest un problème qui sest aggravé au fil des ans ces 28 dernières années, de telle manière que 1.300.000 enseignants iraniens sont entrés dans la couche pauvre de la société. Leur salaire de base est denviron 148 euros par mois. Ce nest quaprès 30 années de travail, quun enseignant peut prétendre acheter une maison à crédit. Contrairement aux années passées, les enseignants ont vu leurs heures de travail augmenter sans contrepartie de salaire et ils ont donc perdu la possibilité de trouver un second emploi pour palier au manque.
Ces problèmes ont provoqué des mouvements de protestations. A plusieurs reprises, les enseignants se sont rassemblés devant le parlement des mollahs. Leur grève ce mois-ci a touché Téhéran et 15 provinces (sur trente). Les conséquences de ces grèves qui ont entraînés la fermeture des établissements scolaires, ont lancé un véritable défi aux mollahs.
Cette situation soulève une question importante : Pourquoi les mollahs refusent-ils dexaminer les revendications des enseignants, alors que les revenus pétroliers de 2006 qui représentent 56 milliards de dollars le permettent largement ? Certaines autorités affirment quelles sont préoccupées du fait quavec laugmentation des salaires des enseignants, linflation augmenterait. Mais les experts rejettent cet argument. Ils disent que dans une société où les problèmes surgissent de toutes parts, les mollahs craignent quen répondant aux revendications des enseignants, ils ne fassent quamplifier à une grande vitesse le mécontentement qui échappera à tout contrôle. Les mollahs ont en mémoire la chute du chah. Cest pour ça quils ont choisi la répression : larrestation des enseignants et leur libération sous une caution de 80.000 dollars, le licenciement des protestataires, le passage à tabac des gréviste et les menaces.
Les mollahs montrent quils ne sont pas capables de régler les problèmes de la société iranienne. Les experts prévoient une aggravation des troubles sociaux dans les semaines à venir. Le mois dernier, les étudiants et les ouvriers ont également protesté à une grande échelle.
Beaucoup pensaient que si la communauté internationale adoptait une politique de fermeté vis-à-vis des mollahs, les Iraniens se rassembleraient derrière les mollahs. Or le développement des protestations populaires après ladoption de la seconde résolution du Conseil de sécurité de lONU, prouve le contraire : la société iranienne veut se débarrasser de la dictature religieuse.
* Mohammad Amine, est un spécialiste de lIran qui écrit dans de nombreux médias internationaux