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Iran : Risque imminent d’exécution pour une femme

Iran : Risque imminent d’exécution pour une femmeCNRI – Ce qui suit est un communiqué public d’Amnesty International en date du 22 septembre (traduit de l’anglais), alertant sur le risque d’exécution imminente d’une femme en Iran :

AMNESTY INTERNATIONAL

PUBLIC                                                                                          AI Index: MDE 13/106/2006                                                                                                         
UA 252/06 Imminent execution  22 septembre 2006

IRAN          Kobra Rahmanpour (f), 25 ans environ

 

On craint que Kobra Rahmanpour risque une exécution imminente pour meurtre. Le Bureau pour l’exécution des peines, qui met en oeuvre les exécutions, a fixé la date limite du 12 octobre pour que la famille de la victime du meurtre décide de renoncer à son droit de voir Kobra Rahmanpour exécutée et de réclamer le paiement de la diyeh (prix du sang) à la place. S’ils persistent à vouloir l’exécution, il y a de grandes chances pour que celle-ci ait lieu peu après le 12 octobre.

Kobra Rahmanpour a été arrêtée le 5 novembre 2000 et a été condamnée à mort par la Division 1608 du Tribunal pénal de Téhéran en janvier 2002 pour avoir tué sa belle-mère. En 2003, la sentence a été confirmée par la Cour suprême. Elle a avancé avoir agi en légitime défense après que sa belle-mère ait tenté de l’attaquer avec un couteau de cuisine. Kobra Rahmanpour se serait mariée contre sa volonté sous la pression de ses parents, en raison de la pauvreté de sa famille, et a été victime de violence domestique pendant son mariage. Elle n’a pas eu accès à un avocat avant l’ouverture de son procès.

Il était prévu que Kobra Rahmanpour soit exécutée le 31 décembre 2003. Cependant, ce jour-là, le juge du Bureau pour l’exécution des peines a confirmé à un journaliste du site d’information en ligne ISNA, Iranian Students’ News Agency, que l’exécution avait été annulée parce que les autorités carcérales n’étaient pas suffisamment équipées pour celle-ci (elles ne disposaient apparemment pas de menottes pour la conduire sur le site de l’exécution).

En janvier 2004, l’ayatollah Shahroudi, chef de la Justice, a reporté temporairement l’exécution afin de donner à la famille de la victime l’opportunité de pardonner Kobra Rahmanpour. Dans une lettre à Amnesty International en date du 3 février 2004, l’ambassade de la République islamique d’Iran à Londres a affirmé que la procédure légale dans cette affaire avait été achevée et que la sentence ne pouvait être commuée uniquement si les héritiers de la victime renonçaient à leur droit au châtiment et réclamaient une indemnité compensatoire à la place. L’affaire a été ensuite transférée à un organisme de médiation connu sous le nom de Conseil pour la résolution des différends (en persan, Shoray-e Hall-e Ekhtelaf), pour que la famille de la victime choisisse ou non de renoncer à son droit au châtiment et d’accepter le paiement du prix du sang. Toutefois, aucune résolution n’a été prise. Selon l’avocat de Kobra Rahmanpour, la famille de la victime n’est pas d’accord pour lui pardonner. Au début du mois de septembre 2006, le Bureau pour l’exécution des peines aurait donné à la famille jusqu’au 12 octobre pour décider de pardonner Kobra Rahmanpour.

Kobra Rahmanpour est détenue dans la prison d’Evine depuis presque six ans, mais elle est condamnée à mort depuis quatre ans. En septembre 2006, elle a écrit une lettre ouverte, publiée sur Internet, dans laquelle elle a déclaré :

« Je suis un être humain comme vous. Je ne veux pas mourir. Mais à l’heure actuelle, je ressemble plus à un corps sans vie qui a oublié le bonheur et le rire et qui est terrorisé par son exécution… Je ne suis qu’à un pas de la mort. Comme vous tous, j’ai peur de mourir. Aidez-moi pour que ceci ne soit pas ma dernière lettre. Très souvent je m’échappe par la pensée et je rêve que ma vie a suivi un chemin différent. Je rêve de pouvoir finir mes études pré universitaires. Je rêve de ne pas être forcée de travailler et de servir la famille de mon mari. Je rêve de ne pas avoir atteint la limite de la folie. Mais j’ai tellement souffert. Je suis une vraie victime. Et c’est cette victime qu’ils vont pendre jusqu’à sa mort. Ce n’est pas le sort que je mérite. En ces jours de terreur et d’horreur, je me tourne une fois de plus vers vous. Je remercie tous les médias, journaux et personnes qui m’ont soutenue et qui ont clamé ‘Kobra ne doit pas être exécutée’. Cette fois, peut-être la dernière, je vous demande d’accomplir un dernier effort pour moi pour que je ne sois pas exécutée et que j’ai une chance d’être libre. Dans mes rêves, je pense toujours à la liberté et à une belle vie après tout ça. J’ai suffisamment souffert. Aidez-moi pour que cet horrible cauchemar qui m’a si souvent poursuivi dans mon sommeil et réveillé en criant, ne devienne pas réalité. Aidez-moi à échapper à la mort. Faites tout votre possible, il reste peu de temps. Ces jours restants vont s’écouler eux aussi et pour moi, chaque seconde qui passe me rappelle que la mort est proche. S’il vous plaît, aidez-moi ! Je suis terrifiée par la mort et par cette exécution. Je maudis cette corde et cette grue. Je veux vivre. Toutes les autres voies me sont fermées. Personne n’est là pour moi. Mon seul espoir réside dans les gens et dans mes semblables. Je veux serrer mon père et ma mère dans mes bras. Enfin, je voudrais remercier ma famille et toute personne qui lutte pour me sauver pour tous leurs efforts. »

Le 11 mai 2006, le Groupe de travail sur la détention arbitraire des Nations Unies, a publié un communiqué sur cette affaire. Etant donné que Kobra Rahmanpour n’avait pas eu accès aux services d’un avocat pour sa défense « entre le moment où elle a été placée en détention provisoire et le début du procès », le groupe a souligné: « L’absence de représentation légale dans une enquête sur un crime passible de la peine capitale peut sérieusement compromettre une valeur humaine suprême, la vie de l’accusé. Ce Groupe de travail pense que dans le cas présent, l’absence d’avocat de la défense dès la phase initiale de l’enquête est si néfaste pour les intérêts de la justice en général, et pour les intérêts de la personne accusée en particulier, qu’elle confère à la procédure pénale un caractère arbitraire ». Le Groupe de travail sur la détention arbitraire a ajouté : « Dans les circonstances spécifiques de cette affaire, et gardant en mémoire le fait qu’elle est condamnée à mort depuis longtemps, le recours le plus approprié serait d’obtenir une dérogation à la mise en œuvre de la peine capitale. Une mesure aussi généreuse, selon le Groupe de travail, serait la bienvenue et serait extrêmement appréciée par la communauté internationale ».

[Working Group on Arbitrary Detention, Opinion No 14/2006, 11 mai 2006, paragraphe 15].