dimanche, juin 11, 2023
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Iran: Quand les luttes internes dévoilent la corruption financière astronomique des mollahs

CNRI – Téhéran bourdonnait de révélations d'un homme du sérail sur la corruption financière astronomique des ténors de la théocratie, notamment de haut dignitaires religieux. Un coup de sifflet qui marque une nouvelle escalade des querelles intestines, d’une intensité jamais vue ces trois dernières décennies.

 

Le cycle de dénonciations, avec les factions s’accusant tour à tour, forme désormais une spirale échappant à tout contrôle. Les accusations de fraude financière massive qui viennent de s’étaler au grand jour ont fait surface dans un discours prononcé récemment par Abbas Palizdar, un membre de la commission d'enquête du Majlis (Parlement). Il a accusé 44 des plus hauts dignitaires religieux et responsables du régime non seulement de voler effrontément, mais aussi de planifier l'élimination physique de leurs rivaux. Il a divulgué des informations indiquant que certains accident d’avions ces dernières années ayant entraîné la mort de ministres et de hauts commandants des gardiens de la révolution n’avaient pas été le fruit du hasard.

Le guide suprême Ali Khamenei a rapidement saisi la gravité de ce nouveau cycle. Cherchant à ralentir ce travail de sape, il a consacré une bonne partie de ses récents discours aux appels à l'unité, tout en exprimant un soutien implicite à Palizdar.

Les révélations de Palizdar sont d'autant plus importantes, qu’il est un proche allié de Mahmoud Ahmadinejad, le président des mollahs et des gardiens de la révolution, le CGR. Traditionnellement, quand le CGR entre dans le cycle des dénonciations, cela prend vite l’allure de purges internes. Il pourrait très bien s’agir du prélude à l’élimination physique de rivaux ou même d’alliés indisciplinés. La faction rivale a riposté, puisque Palizdar a été arrêté le 11 juin sus une avalanche de charges, y compris celle de «diffusion de rumeurs».

Les noms cités dans cet énorme scandale de corruption financière sont: l'ayatollah Kachani Imami, membre du Conseil des gardiens et actuel imam du vendredi de Téhéran; l'ayatollah Mohammad Yazdi, membre du Conseil des gardiens et de l'Assemblée des experts et ancien chef de la magistrature; l'ayatollah Makarem Chirazi, très haut dignitaire qui est également « source d'émulation religieuse », et enfin, sans surprise, le champion toute catégorie dans ce domaine l’ancien président Ali Akbar Hachemi Rafsandjani et sa famille.

Palizdar a dit à son auditoire que «la raison pour laquelle nous ne pouvons pas régler la corruption économique, c’est que les principaux dirigeants du pays y sont impliqués ». Avant d’ajouter « les chiffres de la corruption économique active dans le pays sont actuellement sous la protection de Chahroudi, le chef de la magistrature. »

«En ce moment il ya 123 cas faisant l’objet d'une enquête pour corruption économique, mais si nous voulons connaître le chiffre réel, c’est simplement incroyable. Nous sommes témoins de catastrophes sous la République islamique."

Se référant à une affaire impliquant Kachani Imami, il a déclaré : « Il a envoyé une lettre disant que son fils était handicapé physique et qu’il envisageait d'ouvrir un centre pour handicapés physiques afin que son fils puisse rester auprès de lui là-bas et le centre pourrait s'occuper de 100, 200 ou 300 autres handicapés. Après l’ouverture du centre, il a re-écrit pour demander le financement du centre par l'État et a suggéré que les carrières de marbre de la province de Fars soient enregistrées sous son nom à cette fin. Sa demande a été approuvée et il est devenu propriétaire des carrières. Peu de temps après, il s'est plaint de nouveau que le marbre n'était pas suffisant pour financer le centre et il a demandé d'autres mines à Zanjan. Il a finalement obtenus plus de quatre mines pour faire tourner un centre de handicapés. Cet homme est un théologien islamique et malheureusement, il est également imam du vendredi. »

Dans une affaire mettant en cause Yazdi, l’ancien chef de la magistrature, Palizdar a déclaré : « Ils ont obtenu l'approbation de Khamenei pour ouvrir une école de sciences judiciaires pour femmes à Qom. Après avoir obtenu l'approbation, il a immédiatement demandé un soutien financier pour le projet et ont demandé à se faire octroyer l’entreprise de pneus Dena.

Pour évaluer le prix de l'usine certains experts officiels du ministère de la Justice l’ont évalué à 1260 milliards de rials alors que son prix réel était plus de 6000 milliards de rials. L’évaluation n’a même pas pris en compte les propriétés de l'usine qui s'élèvent à des milliards de rials.

Dena avait été attribuée à Yazdi quand il était encore à la tête de la magistrature. Mais quand est venu le moment de payer, il a demandé une remise et il a immédiatement obtenu 50 % de réduction. Il a écrit de nouveau pour demander davantage de rabais et il l’a recommencé cinq fois. A la fin, on lui a demandé de payer seulement 100 milliards, une baisse de 1260. Mais même à ce moment, il n’a pas payé les 100 milliards. Il a proposé de payer 80% par des versements à long terme versements et 20 %, soit 20 milliards, en espèces. Puis, il a de nouveau dit qu'il n’avait pas d’argent pour payer les 20 milliards, il s’est donc vu offrir un prêt de 230 milliards de rials par l’Organisation des industries nationales iraniennes. Cette dernière a ensuite demandé à voir l'ayatollah pour obtenir sa signature. Peu après l'usine a été vendue et transférée à ceux qui tiraient les ficelles en coulisses. »

A propos du pillage commis par Yazdi, Palizdar ajoute: « Yazdi a de nouveau écrit pour dire que son fils était sans emploi et il a demandé des arrangements spéciaux pour lui permettre d’exploiter des forêts du nord à des fins d'exportation du bois. Or son fils était directeur général dans la magistrature. Malheureusement, les forêts du nord ont été mises à sac. »

La corruption économique de Rafsandjani et sa famille

Palizdar qualifie la corruption économique de Rafsandjani et de sa famille d’innommable. « L'un des exemples de la corruption économique de cette famille est son refus de payer des impôts pour les importations, qui s'élèvent à des milliards de dollars. Le contrôle d'un tiers de l'île de Kish et de la forêt du nord fait partie de la corruption économique des Rafsandjanis. Le coût des pastèques données aux chevaux du haras de la fille de Rafsandjani est d’un million de rials par jour. Le profit réalisé par la compagnie pétrolière de cette famille et de la sœur de Rafsandjani qui vit au Canada est inimaginable. » 

Riposte de la faction rivale

Mohsen Sazegara, un des fondateurs des gardiens de la révolution a déclaré dans une interview à la radio : « Palizdar appartient à la faction d’Ahmadinejad. Il faut s’interroger sur la mauvaise conduite de sa faction. Ils ont volé l'argent du ministère du pétrole et de dizaines d'organes de l'État. Le plus important c’est le CGR avec plus de 800 entreprises et sa participation dans plus de 1500 projets d'envergure du pays. »

Il a ajouté : « Un grand nombre de postes de direction dans le pays sont donnés à des proches d’Ahmadinejad et des commandants du CGR d’un niveau élevé ou moyen. Et qu'en est-il de la famille de Khamenei ? Qu'en est-il des grandes organisations comme que la Fondation des déshérités, la Fondation des martyrs et le Siège de la mise en œuvre du commandement en 8-points de l'Imam qui sont tous exemptés de tout contrôle. Il y a eu peut-être des centaines ou des milliers de cas de corruption dans ces centres. »

Conclusion

Avec la nouvelle phase de purge et d'élimination, qui a débuté juste avant les élections législatives de mars, on peut s'attendre à une aggravation alors que le mouvement pour la démocratie accentue sa pression sur les dirigeants. Les protestations font des percées sur les campus universitaires, et les grèves et les manifestations sont devenues monnaie courante dans de nombreuses usines et entreprises en Iran.

La désintégration du régime, la montée des protestations, les revers en Irak et les sanctions internationales contre le programme nucléaire, ont tous la même dynamique. Mais l'élément central indispensable à la réalisation du changement démocratique, reste le rôle de l’alternative démocratique.