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Iran, l’urgence d’une stratégie coercitive

Iran, l'urgence d'une stratégie coercitive «En dépit des belles paroles sur la démocratie au Moyen-Orient, les Etats-Unis ne soutiennent pas les opposants iraniens»
Le Figaro, 2 février –  Débats et opinions – Le «président» iranien a fait récemment monter à la surface la nature du régime qui l’a installé à grand renfort de fraude électorale ; mais il n’a en rien innové. Dans ses propos exterminateurs, rien que l’ayatollah Khomeyni n’ait clairement énoncé, rien que Hachemi Rafsanjani n’ait répété depuis des années. La nouveauté, si l’on peut dire, est nucléaire : l’Iran djihadiste se promet de commettre de façon nucléaire les crimes sans nom qu’il perpètre depuis vingt-cinq ans de façon «conventionnelle» contre sa propre population et contre le reste du monde.

 

Ahmadinejad croit, et il n’en fait pas mystère, que l’Apocalypse est pour dans deux ans, que l’«imam caché» depuis des siècles, le douzième imam du chiisme («duodécimain»), sortira bientôt de son occultation, et que les croyants peuvent hâter sa venue. L’extermination d’Israël en ferait partie. Il y a là une pathologie, qui aura bientôt le doigt sur la gâchette nucléaire.
Nombre d’Occidentaux sont pris au dépourvu : n’essaient-ils pas depuis des années d’«engager le dialogue» avec Téhéran ? Ne calculaient-ils pas que le régime iranien serait sensible aux sirènes diplomatiques, aux charmes des échanges commerciaux ?
C’est qu’ils refusaient de voir la nature du régime, idéologique avant tout : ils n’entendaient que ce qu’ils voulaient entendre, de la part de diplomates iraniens sans pouvoir ni influence, installés dans les ambassades pour pratiquer des leurres. Comme à chaque fois qu’elles se sont trouvées confrontées à des régimes totalitaires, les démocraties ont délibérément méconnu le rôle dirigeant que joue l’idéologie dans ces régimes pour n’apercevoir que les intérêts d’Etat, comme si le communisme, le nazisme ou l’islamisme étaient sans effet sur le comportement des Etats qu’ils avaient phagocytés. D’où l’éternel refrain : il faut soutenir les «modérés du régime», de peur que les «ultras» ne prennent le dessus… Alors que c’est le régime entier qui est ultra.
Les diplomates iraniens ont maintenant été limogés par fournées entières. Tout comme Khomeyni avait fortement dit : «Nous n’avons pas fait la révolution pour faire baisser le prix du melon», Ahmadinejad a proclamé récemment l’indifférence complète que lui inspire l’effondrement de la Bourse de Téhéran. Il s’agit d’un régime totalitaire. Peu importent l’économie, le niveau de vie, la considération internationale : ce qui compte, c’est l’idéologie : le djihad et le mahdi. Tout le reste est littérature ou artifices.
L’ancien chef du Conseil suprême de la sécurité nationale à l’époque de Khatami, Hassan Rohani, avait énoncé dans une lettre à Khatami la «stratégie politique de l’Iran : créer la crise, la transformer en opportunité, en tirer avantage». Alors que l’Iran s’approche à grand pas de la maîtrise du cycle entier de l’arme atomique et de ses vecteurs balistiques, Ahmadinejad crée la crise en clamant trop fort que l’extermination des Juifs d’Israël est nécessaire, indispensable, prochaine, et que l’Holocauste est un mensonge, une fiction. Susciter artificiellement des crises, qui deviennent l’occasion de réorganiser les dispositifs intérieurs et extérieurs – la méthode est habile, elle n’est pas nouvelle : elle est même typique des dictatures.
Ne s’étonne que l’aveugle de la veille et de l’avant-veille. L’Iran n’est-il pas, avec l’Arabie saoudite, le principal pourvoyeur du djihad, son théoricien, son propagandiste, son financier, son logisticien, son protecteur, et ce, depuis 1979 ? Le centre de gravité du régime n’est-il pas constitué par les barbouzes de la terreur, qui écrasent le peuple iranien, l’accablent de torture et d’arbitraire, et exportent son seul produit, avec le pétrole, la peur et la brutalité nue ?
Que faire ? Les Occidentaux sont coupables d’une pusillanimité sans rivages. Quand bien même il avait rangé l’Iran dans l’«axe du mal», Bush a naguère laissé dire par l’un de ses subordonnés, l’âme damnée de Colin Powell, Richard Armitage, que l’«Iran est une démocratie» ! Pire, l’ambassadeur américain à Bagdad Zalmay Khalilzad a été autorisé à prendre langue avec les ayatollahs, qui sont, avec leurs protégés syriens, les premiers soutiens de la terreur en Irak.
En dépit des belles paroles sur la démocratie au Moyen-Orient, les Etats-Unis ne soutiennent pas les opposants iraniens, alors même que tout indique un violent rejet du régime par la majorité de la population iranienne, et un sentiment pro-américain largement répandu. Quant à la diplomatie européenne, on ne sait s’il faut en rire ou en pleurer, tant elle imite avec talent un méchant loup qui s’avère trop asthmatique pour sortir la moindre exhalaison. L’humble aboulie des troïkas européennes ne leur a pas gagné d’influence. «Oignez vilain, il vous poindra.»
L’échec de la manière diplomatique envers l’Iran est patent, et l’heure approche où Téhéran sera en possession d’armes de terreur massive. La «fenêtre d’opportunité» commence de se refermer. Il serait bon de commencer à imaginer des stratégies coercitives, qui éviteraient le recours ultime à la force. «Poignez vilain, il vous oindra.»