Ces dernières semaines, l’administration du président iranien Massoud Pezeshkian et plusieurs de ses ministres ont adopté un discours inquiétant : ils accusent les Iraniens ordinaires d’être responsables de ses échecs systémiques tout en éludant leurs propres responsabilités.
Plutôt que de s’attaquer aux structures managériales obsolètes de l’Iran et de favoriser un développement significatif, Pezeshkian et son équipe ont eu recours à l’accusation de surconsommation des citoyens, une tactique qui masque les lacunes de leur administration. Comme l’a noté un analyste du journal d’État Jahan-e Sanat le 8 juin 2025, le président « est tombé entre les griffes de gestionnaires qui dissimulent leur incompétence en faisant du public un bouc émissaire ».
Ce détournement de pouvoir n’est pas une réponse aux défis urgents de l’Iran, mais une tentative calculée de rejeter la faute sur les citoyens. Loin de s’attaquer aux causes profondes, la rhétorique du régime insulte une population déjà aux prises avec des difficultés économiques et des défaillances infrastructurelles.
Accuser le public tout en ignorant les failles structurelles
Pezeshkian a affirmé à plusieurs reprises, avec autorité, que « les Iraniens consomment plusieurs fois plus de gaz et d’électricité que la moyenne mondiale », selon le même article.
Cette déclaration est lourde de conséquences : les citoyens sont non seulement victimes des politiques énergétiques inefficaces de l’Iran, mais ils en sont aussi les coupables. En formulant le problème de cette manière, Pezeshkian élude la responsabilité fondamentale du gouvernement : équilibrer la production et la consommation, moderniser les infrastructures vieillissantes et réformer les politiques macroéconomiques défaillantes.
Au lieu de remédier à ces défaillances systémiques, il pointe du doigt l’opinion publique pour détourner l’attention des équipes économiques et techniques inefficaces de son administration.
Cette approche n’est pas propre au président. Le ministre de l’Agriculture a récemment déclaré que « la consommation de sucre et d’huile végétale en Iran est 1,5 fois supérieure à la moyenne mondiale », affirme le journal d’État Tabnak.
Pourtant, il n’a fourni aucune explication quant à l’incapacité de son ministère, avec son budget colossal et sa bureaucratie tentaculaire, à s’attaquer à des problèmes cruciaux tels que la pénurie d’eau, l’érosion des sols, la dégradation des pâturages ou la faible productivité agricole.
Plutôt que de présenter des réformes pour l’agriculture, l’élevage, la pêche ou la foresterie, le ministre s’est joint au concert des critiques envers les citoyens. Le ministère de l’Agriculture, que l’article décrit comme « l’une des institutions gouvernementales les plus grasses », ressemble à une entité creuse qui produit de la paperasse au lieu de proposer des solutions.
Une bureaucratie pléthorique et des priorités mal placées
La tendance du régime à vilipender le public ne se limite pas à l’énergie et à l’agriculture. Le ministère de l’Économie, par exemple, emploie un nombre impressionnant de 2 600 cadres, dont aucun ne semble contribuer significativement à l’amélioration de l’économie. Au lieu de cela, ces fonctionnaires accablent la société de coûts financiers tout en exacerbant les crises qui érodent les moyens de subsistance des citoyens.
Plutôt que de reconnaître leurs échecs, ces cadres exhortent effrontément le public à la « patience » et à la « frugalité », qualifiant d’« extravagance » les demandes légitimes de responsabilité.
La véritable tragédie réside dans la question de savoir qui porte le poids de ce cycle de tromperie et d’humiliation. Il ne s’agit pas des élites privilégiées du gouvernement ni de ceux qui bénéficient du clientélisme de l’État, mais des Iraniens les plus vulnérables : des citoyens pauvres aux prises avec la flambée des prix, les pénuries d’eau et d’électricité et l’instabilité économique.
Ce sont ces personnes qui doivent endurer non seulement des difficultés matérielles, mais aussi les critiques verbales de dirigeants qui ne comprennent pas leur souffrance ni ne cherchent à l’atténuer.
Dans ce système à l’envers, les Iraniens ordinaires portent le fardeau des crises tout en étant présentés comme les principaux responsables.
Une façade réformiste et un fossé grandissant
L’administration Pezeshkian, qui avait promis des réformes, n’a jusqu’à présent guère fait plus que des tactiques recyclées de déni et de détournement de l’attention.
La rhétorique du président, répétée dans les forums publics, trahit un manque d’engagement réel à résoudre les problèmes profonds de l’Iran. Lorsque des fonctionnaires incompétents jugent le peuple, les perspectives de progrès politique ou économique significatifs s’amenuisent.
Pire encore, cette approche creuse le fossé entre le gouvernement et la nation, un fossé qui se creuse chaque jour dans les rues iraniennes.
Ce fossé grandissant, alimenté par l’aliénation politique, sociale et culturelle, pose un défi que le système au pouvoir ne peut maîtriser. En persistant à faire de ses citoyens des boucs émissaires, le gouvernement risque d’éroder davantage la confiance et la légitimité, creusant un fossé toujours plus profond entre l’État et le peuple qu’il prétend servir.