lundi, novembre 10, 2025
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L’industrie pharmaceutique iranienne en crise

L'industrie pharmaceutique iranienne en criseLe secteur pharmaceutique et des équipements médicaux en Iran, pilier du système de santé du pays, s’enfonce dans une crise profonde, principalement due à une mauvaise gestion interne et à la corruption du gouvernement. Cet effondrement a contraint les patients à payer des médicaments à des prix inabordables, a conduit les fabricants au bord de la faillite et a révélé les défaillances structurelles du régime en matière de protection de la santé publique.

Contrôle des prix : une politique qui se retourne contre lui
Au niveau national, le contrôle des prix imposé par l’État est un facteur majeur de crise. Bien que présentée comme une mesure de protection des patients, cette politique a anéanti à la fois les producteurs et les consommateurs. Heydar Mohammadi, ancien directeur de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), souligne que la tentative du gouvernement de plafonner les prix des médicaments a affaibli le rôle des assurances et contraint les entreprises à interrompre la production de médicaments hospitaliers essentiels en raison de retards de retour sur investissement d’un an.

Les experts affirment que limiter les hausses de prix à 15 % dans une économie où l’inflation atteint 40 % détruit le marché et pousse les producteurs à la fermeture. Avec des marges bénéficiaires réduites à peine à 3,9 %, l’innovation, la recherche et le développement sont mis à l’écart, laissant le secteur technologiquement stagnant par rapport aux entreprises européennes qui réinvestissent leurs profits élevés dans la modernisation.

Crise de trésorerie et retards de paiement
Les pénuries de liquidités ont enfermé le secteur dans un cercle vicieux. Mehdi Pirsalehi, directeur de l’FAO, souligne que les dettes impayées massives des institutions gouvernementales ont paralysé la production, rendant les devises allouées inutilisables. Avec des cycles opérationnels dépassant 400 jours et des coûts de financement supérieurs à 38 %, les entreprises sont contraintes de contracter des prêts à taux d’intérêt élevés, réduisant à néant les marges bénéficiaires supposées de 25 % de l’État.

Par ailleurs, Mohammad Abbedehzadeh, président du Syndicat des industries pharmaceutiques humaines, souligne que les demandes de remboursement des laboratoires pharmaceutiques, souvent retardées de plus de deux ans, font rarement la une des journaux, contrairement aux dettes des producteurs de blé, ce qui met en évidence le manque de priorité accordée par le régime aux médicaments en tant que produit stratégique.

Défaillances de l’assurance et subventions faussées
La faiblesse de l’assurance fragilise encore davantage le secteur. Mohammadi affirme qu’une assurance solide pourrait stabiliser le système, mais les agences manquent de financement de la part de l’Organisation de la planification et du budget. L’Organisation de la sécurité sociale détourne les primes d’assurance maladie vers les retraites au lieu des soins de santé, ce qui entraîne des retards de paiement de six mois pour les pharmacies.

Plutôt que de renforcer l’assurance, le régime recourt à des subventions indirectes, ce qui favorise la contrebande de médicaments vers les pays voisins, épuise les réserves nationales et aggrave la corruption.

Instabilité managériale et conflits d’autorité
Les fréquents changements de direction ont exacerbé la crise. En seulement huit ans, certains départements ont connu cinq changements de directeurs, anéantissant la stabilité institutionnelle. L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) ne contrôle que 30 à 35 % du processus décisionnel, tandis que les pouvoirs clés restent fragmentés entre la Banque centrale, le Parlement et d’autres agences, ce qui rend la responsabilité dispersée et inefficace.

Le contraste avec les pays voisins souligne la gravité de l’échec. La Turquie dépense 10,3 milliards de dollars par an en produits pharmaceutiques, contre 5 milliards pour l’Iran. Sans soutien à la production nationale, prévient Pirsalehi, les importations deviendront exponentiellement plus coûteuses. Avec des taux d’amortissement élevés et l’absence d’investissements annuels d’au moins 200 millions de dollars, l’industrie pharmaceutique iranienne est en déclin rapide.

Une défaite stratégique
Le déclin de l’industrie pharmaceutique iranienne n’est pas seulement un problème économique : c’est un échec stratégique de la gouvernance sous le joug d’un pouvoir clérical absolu. Ce qui devrait être un pilier de la sécurité sanitaire nationale est devenu le symbole d’une corruption systémique, de politiques malavisées et de priorités mal placées.

Les patients sont confrontés à des pénuries, les producteurs à la faillite et la confiance du public s’érode envers un régime qui traite la médecine comme une simple marchandise, tout en sacrifiant la santé publique pour maintenir son emprise au pouvoir.