Le 16 septembre 2022, la nouvelle a fait le tour du monde que Mahsa (Jina) Amini, une jeune fille kurde de 22 ans, était tragiquement devenue la dernière victime des opérations de patrouille de moralité du régime, ce qui a embrasé une société excédée. En moins d’une semaine, ce qui avait commencé par des manifestations localisées a rapidement embrasé le pays tout entier. Les bâtiments de l’État et les voitures de police ont été laissés en ruine, les mollahs ont été attaqués et les forces de sécurité se sont heurtées à la résistance et ont même subi des pertes. Malgré des dizaines de milliers d’arrestations et des centaines d’exécutions, l’exigence du renversement de régime d’Ali Khamenei reste vive.
Alors que le premier anniversaire du soulèvement de 2022 se rapproche, deux fronts opposés se préparent à un nouvel affrontement. D’un côté, les citoyens sont déterminés et élaborent des stratégies pour coordonner, rassembler et lancer la prochaine vague de manifestations. De l’autre côté, les mollahs mobilisent toutes les ressources disponibles pour étouffer l’inévitable tempête.
Au cours des derniers mois, le régime a intensifié ses efforts pour supprimer les éléments qu’il perçoit comme des sources potentielles de menace. En arrêtant des détenus politiques récemment libérés, en réactivant les patrouilles de police des mœurs dans les métropoles et les zones urbaines, en licenciant des professeurs d’université jugé pas trop proches du régime et même en sapant l’association du barreau iranien en la transformant en une entité contrôlée par le gouvernement, le régime fait part de son intention de réprimer la dissidence par tous les moyens disponibles. En particulier, le nombre des exécutions en 2023 s’élevait à 500 au 21 août.
Boussole intellectuelle
Parmi ces stratégies, l’accent est mis sur les universités et les étudiants, qui ont joué un rôle crucial dans les soulèvements de 2022. Ils ont joué le rôle de boussole intellectuelle de la société, en éloignant la nation des tactiques historiques du régime visant à tromper l’opposition. Selon un document publié et diffusé dans les universités iraniennes, le gouvernement d’Ebrahim Raïssi a entamé le processus de recrutement de 15 000 membres de la milice bassidj et des partisans du régime en tant que membres du corps enseignant. Dans le même temps, de nombreux professeurs et membres du personnel universitaire sont licenciés ou mis à la retraite anticipée.
Dans un communiqué, le ministère iranien de l’Intérieur a défendu l’expulsion des professeurs indépendants des universités : « Ce que le ministère des Sciences a entrepris contre quelques professeurs qui ont connu une stagnation académique a été réalisé sur la base de critères légaux et, bien sûr, c’est le devoir révolutionnaire de ce ministère. »
Selon un rapport publié le 28 août par le journal officiel Ensaf News, un nombre important de « cas disciplinaires » impliquant des étudiants militants a fait surface – près de 200 cas. Toutefois, ces étudiants estiment que le nombre réel de ces affaires dépasse largement ce chiffre, avoisinant les 400 cas.
Début juillet, l’université de Téhéran, l’un des principaux établissements d’enseignement en Iran, a annoncé son intention d’inscrire des membres des Forces de mobilisation populaire irakiennes (FMP), également appelées Hashd-al-Shaabi. Cette milice, qui agit comme une extension du régime des mollahs, est connue pour les crimes odieux qu’elle a commis en Irak et dans la région.
En plus de chercher à s’inscrire à l’université et de poursuivre d’autres privilèges économiques, les personnes associées à l’appareil de sécurité du régime ont gagné en importance. Au cours des derniers mois, les plus hauts responsables du régime théocratique ont organisé des rassemblements et des assemblées, en invoquant divers prétextes pour élever le moral ceux qu’ils considèrent comme des « gardiens de la république islamique ».
Ali Asghar Daryaee, directeur général du ministère de la Culture et de l’orientation islamique dans la province du Kurdistan, a déclaré le 23 août qu’il mettait en œuvre une initiative systématique visant à éliminer les journalistes qualifiée de « raffinement des journalistes ». Des rapports antérieurs datant de la mi-juin indiquent que des initiatives similaires ont été lancées dans d’autres provinces. Alors que les professions ayant un impact significatif sur l’opinion publique ont toujours été étroitement surveillées par l’appareil de renseignement du régime, ces efforts récents montrent que rien n’est plus considéré comme sûr par le régime.
La radicalisation en ligne de mire
La dictature théocratique a lancé une campagne sévère contre les régions les plus défavorisées du pays, qui présentaient un potentiel de révolte important. Le régime a procédé à des dizaines d’exécutions dans la province du Sistan et du Baloutchistan, dans le sud-est du pays, tandis que ses forces de sécurité ont continué à tuer des porteurs de carburant appauvris qui luttaient pour gagner leur vie. Le nombre de meurtres cautionnés par l’État au Kurdistan est également alarmant, le régiment frontalier du régime dans la province occidentale s’en prent fréquemment aux pauvres transporteurs de marchandises, connus sous le nom de « koulbars ».
Par conséquent, Téhéran a involontairement nouri un conflit qu’il espérait empêcher. Avec la recrudescence du trafic d’armes dans le pays, le nombre de victimes parmi les forces de sécurité a également augmenté, en raison des affrontements avec la population.
Comme l’a rapporté l’agence de presse officielle Tasnim le 23 août, citant le commandant des forces de sécurité de l’État du régime, 45 membres des forces de l’ordre au total ont été tuées entre le début de l’année civile persane et la mi-août.
Le 28 août, Nasser Kanaani, porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères du régime iranien, a lancé un avertissement au gouvernement irakien: « si les partis kurdes iraniens de la région du Kurdistan ne désarment pas d’ici le 19 septembre, la République islamique prendra des mesures appropiées« .
Au plus fort du soulèvement de 2022, alors que des villes de tout l’Iran, en particulier dans la province du Kurdistan, se révoltaient contre l’autorité du Guide Suprême, le régime des mollahs a réagi en lançant des frappes de missiles sur les groupes kurdes iraniennes situées dans la région du Kurdistan irakien. L’objectif de cette action était de supprimer leur soutien à l’intensification de la rébellion et de les contraindre au silence.
Résistance organisée
Par aileurs, la dictature théocratique a lancé une vaste campagne sur plusieurs fronts contre la Résistance iranienne. En intensifiant les efforts de propagande à l’intérieur et à l’extérieur des frontières iraniennes, en contraignant les gouvernements occidentaux à exercer des pressions sur le Conseil national de la Résistance iranienne et en concoctant de faux récits à son sujet, le régime a cherché à influencer simultanément deux publics distincts. À l’égard de ses propre partisans démobilisés il cherchait à montrer son autorité et sa domination sur la contestation. Pour la population en général, le régime cherchait à imposer un sentiment de désolation et de perte d’espoir.
Parallèlement, alors que les factions internes du régime s’entredéchirent, elles révèlent beaucoup de choses sur leurs propres vulnérabilités.
La hantise du régime face à la Résistance et à la société iraniennes l’a induit en erreur dans ses évaluations. Luttant depuis six décennies dans l’adversité des changements géopolitiques, les résistants iraniens ont fait trop de sacrifices et sont allés trop loin pour abandonner leur objectif de la liberté pour l’Iran. Tandis que le peuple iranien a trop perdu et ne lui reste rien de plus à perdre. Quel que soit le jour du calendrier, ils ont amplement les raisons de se révolter.