jeudi, mars 28, 2024
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La Résistance iranienne : Un nouveau facteur dans la politique iranienne

Par Shahin Gobadi, membre de la commission des affaires étrangères du CNRI

Malgré le débat sur l’accord nucléaire avec l’Iran, la communauté internationale devrait être prête à se pencher sur la question plus vaste de savoir quelle est la bonne politique pour traiter avec l’Iran en général. Alors qu’il y a un consensus croissant des deux côtés de l’Atlantique sur la nécessité de prendre en compte la menace grandissante du régime iranien, il y a un certain désaccord sur la bonne façon de procéder et sur la menace d’une escalade des tensions.

Le talon d’Achille des ayatollahs se trouve à l’intérieur de l’Iran. L’équation iranienne a changé pour de bon après les soulèvements populaires massifs qui ont ébranlé le régime à la fin décembre et en janvier lorsque les Iraniens ont manifesté dans plus de 140 villes et villages à travers l’Iran. En scandant des slogans comme « mort à Khamenei » et « mort à Rohani », ils ont manifesté clairement et sans équivoque leur aspiration à un changement de régime. En scandant des slogans comme « radicaux, réformateurs, le jeu est maintenant terminé », ils ont rejeté la notion de modération à l’intérieur du régime théocratique.

Les protestations ont également dissipé les allégations selon lesquelles l’accord nucléaire aidait le peuple iranien et contribuait à son bien-être. L’économie iranienne est totalement désorganisée. La devise nationale a dévalué de plus de 50 pourcent par rapport à mai 2017, et cette tendance baissière sans précédent ne semble pas sur le point de s’arrêter.

La corruption et le népotisme sont également endémiques. Plusieurs établissements financiers affiliées aux pasdaran et approuvés par la Banque centrale ont détourné des montants astronomiques et ont déposé le bilan, provoquant presque quotidiennement les protestations des déposants qui scandent des slogans contre le régime dans son ensemble. Et bien sûr, le régime ne peut satisfaire leurs besoins puisqu’il n’a pas d’argent.

Les retombées économiques de l’accord nucléaire ont été pillées par les ayatollahs et les Gardiens de la révolution (pasdaran), ou utilisées pour soutenir le dictateur syrien Bachar el-Assad ou pour financer des groupes terroristes comme le Hezbollah. Pendant ce temps, il ne se passe pas un jour sans protestations ouvrières dans diverses villes. La presse officielle iranienne est truffée d’infos de travailleurs et de fonctionnaires qui font la grève ou protestent pour n’avoir pas été payés depuis 23 mois.

La situation est si précaire qu’un ayatollah de très haut rang, Javadi Amoli, alors qu’il s’entretenait avec le ministre du Travail à Qom le 27 avril, a qualifié d’incompétents les responsables des affaires économiques et a dit aux responsables du régime : « s’il y a un soulèvement, nous serons tous jetés à la mer. » Il a ajouté : « Bien sûr, beaucoup de responsables ont fui, beaucoup ont trouvé un endroit sûr pour s’échapper, mais nous, nous n’avons nulle part où fuir. »

Le 29 avril, le président iranien Hassan Rohani a déclaré : « Plusieurs parmi nos ministres expriment leur pessimisme et leur déception depuis le début de la nouvelle année (le 20 mars) et leurs commentaires sont pessimistes. »

Des slogans comme « laissez la Syrie tranquille, pensez à nous » et « l’ennemi est ici, mais les menteurs disent que ce sont les États-Unis », sont des signes évidents que les politiques du régime sont rejetées par la population et que la propagande du régime est devenue totalement inefficace.

Le 2 janvier, Rohani s’est entretenu par téléphone avec le président français Emmanuel Macron et s’est plaint que l’Organisation des Moudjahidine du peuple d’Iran (OMPI), causait des troubles en Iran. L’OMPI est la principale composante du Conseil national de la Résistance de l’Iran – CNRI, et Rohani a demandé à son homologue français de restreindre les activités du groupe, dont le siège est situé en dehors de Paris. Le 9 janvier, Ali Khamenei, le Guide Suprême du régime, a souligné que l’OMPI était la principale force derrière le récent soulèvement et l’avait planifié plusieurs mois à l’avance. Les aveux surprenants de Khamenei et l’appel désespéré de Rohani montrent que l’OMPI représente une menace croissante pour le régime théocratique.

Après le soulèvement de décembre-janvier, la présidente du CNRI, Maryam Radjavi, a déclaré que les protestations se poursuivront et que le mouvement évoluera jusqu’au renversement du régime théocratique. Depuis, il y a eu de grandes manifestations et des actes de défi à Téhéran, à Ispahan, à Ahvaz et au Khouzestan. Dans chacun de ces endroits, les troubles se sont poursuivis pendant plusieurs jours malgré la répression du régime, puis ont éclaté ailleurs.

Comme Maryam Radjavi l’a souligné dans ses propos à la convention des Irano-Américains à Washington le 5 mai : « Le peuple iranien, qui a participé à des centaines de manifestations et de soulèvements depuis décembre, cherche à renverser le régime théocratique dans son ensemble. Ils appellent la communauté internationale, en particulier l’Occident, à soutenir leur soulèvement pour le renversement du régime des mollahs. Nous exhortons instamment la communauté internationale à ne pas rester silencieuse face aux crimes constants perpétrés par un régime qui détient le record mondial d’exécutions par habitant. Nous les exhortons à adopter des mesures punitives pour contraindre les mollahs à libérer les personnes arrêtées lors des récentes manifestations, notamment des centaines de nos compatriotes arabes dans la province du Khouzistan et un grand nombre de Kurdes dans l’ouest de l’Iran, et pour mettre fin à la poursuite barbare des agriculteurs à Ispahan. »

En un mot, un nouveau facteur est entré dans la politique iranienne : le facteur du peuple. C’est le cauchemar des mollahs et leur talon d’Achille, et cela va changer la donne.

Le 30 juin, les Iraniens et leurs sympathisants internationaux se réuniront lors d’un événement majeur à Paris, le rassemblement pour « Un Iran libre 2018 », afin de soutenir le soulèvement populaire et la perspective d’un changement de régime du peuple iranien. D’éminents hommes politiques aussi bien américains qu’européens y prendront part. Compte tenu de toutes les préoccupations concernant l’Iran et sa conduite néfaste et à la lumière de tous les grands changements en Iran, le message de ce rassemblement est plus important que jamais. L’Occident en général et Washington en particulier seront avisés d’accorder une attention particulière à l’événement et au message dont les expatriés Iraniens se feront l’écho au nom de leurs compatriotes l’intérieur. Ils ne chercheront pas à obtenir de l’argent, des troupes ou des armes de l’Occident. Ils veulent une politique ferme qui tienne les ayatollahs responsables et se range du côté des Iraniens et de leur Résistance dans leur quête pour arracher leur pays à l’emprise de la dictature théocratique.

Une Iran libre, démocratique et non nucléaire est un objectif sur lequel tout le monde peut s’entendre. Alors que la société iranienne est confrontée à des troubles constants et que les ayatollahs sont en proie à des problèmes sociaux et économiques croissants et à un isolement régional et international croissant, il semble que les perspectives d’un changement de régime n’ont jamais été aussi claire.