jeudi, mars 28, 2024
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Maliki est un menteur parce qu’il enfreint le droit international et qu’il tue – Juge Robertson

CNRI – « Il y a une petite force des Nations Unies, en Irak, la MANUI. Elle a un mandat limité mais cela ne l’empêche pas de prendre position à Achraf ou en dehors d’Achraf pour protéger le camp ces quelques semaines ou mois à venir. L’ONU doit donc mettre ses casques bleus, dans les environs du camp pour en faire un refuge sûr jusqu’à ce que ce cas d’urgence soit résolu », a déclaré le juge britannique Jeffrey Robertson, juriste britannique et ancien président de la cour internationale pour le Sierra Leone le 11 novembre à Genève.

Je suis un conseiller de la couronne britannique et j’ai été le premier président de la cour internationale de Sierra Leone qui avait pour but de juger Charles Taylor pour crimes de guerre. Je possède donc une expérience considérable, ayant pris part aux progrès du droit international à un niveau où il peut heureusement offrir quelque protection aux civils contre la perspective d’être tués, torturés ou maltraités. C’est à partir de cette perspective que je vous parle aujourd’hui.

Je ne connaissais pas ce dossier jusqu’à ce que la fondation Burmound à Washington me demande de conduire une enquête sur les massacres de prisonniers en 1988, et j’ai passé beaucoup de temps à parler aux survivants et à travailler sur ce qui s’était passé. J’ai publié ce rapport qui est disponible sur le massacre des prisonniers membres des Moudjahidine en 1988 sur les ordres de nombreuses personnes dont beaucoup sont à des postes importants et même très importants en Iran aujourd’hui. Je considère ces massacres de prisonniers comme un des rares grands crimes du 20 ème siècle et peut-être un des grands crimes inconnus.

C’est sans doute équitablement comparable à la barbarie des marches de la mort des prisonniers de guerre japonais à la fin de la Seconde guerre mondiale. C’est pire, en un sens, que Srebrenica où 7000 hommes et garçons musulmans étaient tués. C’est pire parce que les milliers de jeunes qui ont été tués dans le massacre des prisonniers en 1988 sans véritables procès étaient dans de nombreux cas des détenus qui avaient purgé leur peine, des prisonniers qui avaient été arrêtés sept ou huit ans plus tôt pour avoir manifesté contre les ayatollahs. De sorte que, bien sûr, ils étaient les ancêtres en quelque sorte des Moudjahidine qui sont actuellement au camp d’Achraf.

Il ne fait aucun doute que l’attitude du régime iranien était représentée par les exigences insultantes, meurtrières et glaçantes de Rafsandjani, de Khomeiny et de l’actuel guide suprême de ce pays Ali Khamenei qui était alors au second rang. Ces hommes occupent toujours des positions élevées, détestent et veulent tuer les Moudjahidine parce leurs convictions religieuses divergent essentiellement de celles imposées par la république révolutionnaire d’Iran.

Il ne peut donc y avoir aucun doute que, quel que soit le passé et le conflit, que les Moudjahidine ont mené des attaques jusqu’en 2001. Ils constituaient une force d’opposition armée au régime iranien et ne laissons aucun doute à cet égard.

Mais après 2001, lorsqu’ils ont renoncé à la violence, ils se sont mis hors service. Il y a eu une procédure de mise en hors service dans le camp d’Achraf que les troupes américaines ont supervisée en 2004. Ils forment une organisation politique dans les règles et il est clair qu’en Grande-Bretagne, nos cours ont décidé qu’ils ne sont pas, ne peuvent pas être classés comme une organisation terroriste. Et l’Union Européenne refuse de les classer comme une organisation terroriste.

Bien qu’il ait été statué que la désignation d’organisation terroriste avait été décidée sans respecter la procédure légale, un des plus grands paradoxes dans cette affaire c’est que les États-Unis n’ont rien fait pour réviser cette classification. Et c’est un formidable échec que le gouvernement iranien utilise maintenant pour faire pression sur l’Irak, pression à laquelle il a volontiers succombé pour expatrier les habitants du camp d’Achraf.

À présent, je peux vous dire en tant que juriste international, qu’ils ne peuvent pas le faire en vertu du droit international. Le droit international interdit ce qui est appelé le refoulement, le retour de réfugiés dans un pays où ils seront persécutés. Il n’y a pas de doute que cela interdit au gouvernement irakien d’évacuer ce camp et de déporter ses habitants en Iran. Si jamais cela se faisait, ces habitants seraient en danger de mort, le genre de mort qui a été infligée sans procès, sans décence, sans pitié aux prisonniers en 1988. Ils seraient soumis à la torture et à la persécution. Cela est donc exclu.

Mais le gouvernement irakien lui-même a de terribles antécédents avec le camp d’Achraf. Les forces américaines avaient traité équitablement, correctement et décemment les habitants qui avaient neutralisé leurs armes et les avaient remises, lorsqu’elles les avaient admis et déclarés comme personnes protégées en 2004. Lorsque les Américains ont entamé leur retrait, le gouvernement irakien a commencé à déclencher une réelle violence contre les habitants du camp d ‘Achraf, commençant en 2009 des attaques armées contre le camp, tuant 9 personnes et en blessant beaucoup d’autres. Ils ont déclaré qu’ils allaient faire une enquête, qu’ils n’ont jamais menée, je n’en ai jamais entendu parler. Et ensuite, bien sûr, il y a une autre attaque, récemment, assez brutale, inexpliquée et injustifiée contre le camp d’Achraf qui a fait 37 morts, dont huit femmes. Cela a été un événement monstrueux condamné à travers le monde.

Pensez-vous que Maliki ait fait quelque chose pour l’expliquer ? Pensez-vous que les Irakiens ont suivi le droit international et mené une enquête ? Ils disent qu’ils enquêtent, mais ce sont des menteurs. Maliki est un menteur parce qu’il enfreint le droit international et qu’il tue, sur injonction de suspects en Iran, il tue des personnes qui ont un statut protégé, qui sont à tout point de vue des réfugiés. C’est donc réellement la situation dans laquelle nous nous trouvons. Nous avons 3400 réfugiés dans un pays qui est déterminé à se débarrasser d’eux, coûte que coûte, qui a déjà tué jusqu’à maintenant près de 50 d’eux de sang froid, des meurtres d’Etat de sang froid.

Et il s’agit d’un gouvernement qui doit son existence à l’Occident, l’Irak serait toujours dirigé par Saddam Hussein si l’Occident, si l’Amérique et la Grande-Bretagne, sans doute à tort mais malgré tout c’est un fait, n’avaient évincé Saddam Hussein et changé son régime brutal. Changé avec quoi ? Un autre régime brutal ? Est-ce là ce que Maliki dit à ceux qui, dans de nombreux cas des milliers de soldats, ont été tués pour libérer ce pays de Saddam, pour uniquement trouver une autre sorte de brutalité qui menace maintenant les résidents du camp d’Achraf ?

Il s’agit véritablement d’une situation effroyable, parce qu’al-Maliki a fixé une date, le 31 décembre, coïncidant étrangement avec la date du dernier retrait américain, et il y a toutes les raisons de suspecter, étant donné les meurtres qu’il a ordonnés ces deux dernières années, qu’il y aura d’autres meurtres, que les troupes du gouvernement entreront et massacreront encore ou peut-être déplaceront, comme cela a été suggéré à un moment, le camp entier dans un camp de détention aride dans le désert au sud de l’Irak où ils pourraient mourir de faim, être humiliés et privés de leurs biens.

Parce qu’il faut rappeler qu’en 1986, ce groupe s’est envolé de France, parce que la France les avait expulsés en raison de la pression iranienne. C’est la France qui a cédé la première aux pressions iraniennes en 1986 et les a forcés à aller en Irak, où ils ont été bien sûr accueillis par Saddam Hussein. Il leur a donné le statut de réfugié, son régime le leur a donné assez justement. On leur a donné le camp d’Achraf, un endroit désertique, et ils ont dépensé des millions de dollars pour le remettre à neuf, construire des routes, des écoles, des bibliothèques. Tout ce qu’ils ont et ils ont le droit d’être indemnisés, c’est quelque chose que je vois très clairement dans le droit international.

Je ne pense pas que le camp d’Achraf possède un quelconque statut protégé, il ne s’agit pas d’un régime autonome. Le pays, Irak, est habilité, en vertu du droit international, à exproprier la propriété, ce n’est pas contesté. L’Irak, en tant qu’Etat souverain, peut le faire, mais il doit fournir une compensation, une entière et complète compensation. Il doit honorer les traités internationaux, et traiter ces gens comme des réfugiés, les protéger, s’assurer qu’on ne leur nuit pas, leur permettre de se rendre dans les pays qui les prendront, pas l’Iran, mais d’autres pays, de leur propre plein gré et avec des compensations pour les bâtiments et le terrain dont on les prive, bien qu’ils aient reçu ce terrain, et que depuis 25 ans ils ont construit des structures dessus ; ils doivent recevoir des compensations pour cela. Pour le moment, cela semble être une demande excessivement grande parce qu’ils craignent pour leurs vies.

Que fait la communauté internationale ? Si la responsabilité de protéger a une quelconque signification, c’est un cas classique pour l’exercer. L’ONU a apposé sa signature au principe de Responsabilité de Protéger les civils innocents en danger. Là, nous avons des réfugiés, des personnes protégées qui courent clairement un risque pour leur vie.

Que faut-il faire ? Je pense que les États-Unis portent un lourd fardeau parce qu’ils ont créé une attente légitime lorsqu’ils ont déclaré chacun d’entre eux comme personne protégée. Ils ont créé cette attente légitime et ils doivent l’honorer. C’est donc la première chose.

La seconde, c’est que les Nations Unies sont profondément impliquées, elles sont obligées, de mon point de vue, de s’assurer que leur principe de Responsabilité de Protéger est effectif. J’ai rédigé une consultation juridique, j’espère qu’elle est disponible aujourd’hui, dans laquelle je conclus comme un fait de loi que l’ONU a une responsabilité de protéger l’OMPI parce qu’il s’agit de réfugiés. Leurs dirigeants et le premier contingent sont venus en Irak parce qu’ils ont été expulsés de France en 1986. En vertu du droit international, ils ne peuvent être renvoyés en Iran et le Haut commissaire aux réfugiés a une responsabilité d’assurer leurs droits humains fondamentaux, dont le droit de vivre dans des conditions décentes. C’est donc la situation qui, je crois, s’obtient en droit international.

Il y a une force des Nations Unies, une petite force, en Irak. C’est bien sûr la MANUI. Elle a un mandat limité mais je crois que la limite de son mandat ne l’empêche pas de prendre position à Achraf ou en dehors d’Achraf pour protéger le camp ces quelques semaines ou mois à venir. Les Nations Unies doivent donc mettre leurs troupes, les casques bleus, dans les environs du camp pour en faire un refuge sûr jusqu’à ce que ce cas d’urgence soit résolu. En attendant, le HCR doit s’occuper de ces 3400 personnes.

Nous assistons ici à une approche bureaucratique des plus bizarres du HCR. J’avoue que face à tout le grand travail que cette organisation accomplit, je trouve ça extraordinairement bureautique, dangereux et erroné. Ils disent « Ah ! Nous devons interroger chacun d’eux, individuellement, en dehors du camp d’Achraf ». Or, à la minute où vous sortez les gens d’Achraf, ils sont vulnérables, c’est évident par rapport à ce qui s’est passé ces deux dernières années. C’est stupide de la part du HCR d’imposer cette condition. Nous savons tous que ces 3400 personnes sont de véritables réfugiés. Toute leur histoire clame qu’ils sont d’authentiques réfugiés. Et le HCR adopte cette approche insensée, pointilleuse et bureaucratique de vouloir interroger chaque personne individuellement en dehors du camp d’Achraf.

Il devrait conduire les entretiens dans les prochaines quatre semaines dans le camp et fournir, comme allant de soi, un certificat stipulant que tous parmi eux qui sont là-bas depuis 2008 sont en réalité d’authentiques réfugiés.

Et alors, c’est au tour des pays européens, à la France en particulier parce que la France a selon moi succombé à tort à la pression iranienne toutes ces années depuis 1986 pour les expatrier et c’est pourquoi ils sont allés en Irak au début. C’est donc pour beaucoup à la France que le devoir revient et aux autres pays européens. Et j’appellerais la Baronne Ashton qui est, je sais, préoccupée par cette question et par les droits de l’homme, à user de ses pouvoirs efficaces pour s’assurer qu’avec une petite aide de la part du HCR – qui doit être moins bureaucratique et plus réaliste – de s’assurer que ce cas d’urgence imminent soit résolu aussitôt que possible.