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L’UE et l’ONU prennent le parti de la « tyrannie » au pouvoir en Irak, selon un eurodéputé

Par Ryszard Czarnecki

Il est temps que l’UE cesse de fermer les yeux sur la réalité et arrête de faire l’éloge du gouvernement irakien, alors qu’il est de plus en plus clair que le pays s’est transformé en un satellite du régime des mollahs à Téhéran, affirme l’eurodéputé

publicserviceeurope.com, 14 septembre – L’Occident a échoué en Irak. Après la chute de Saddam Hussein, non seulement l’Irak n’est pas allé vers plus de démocratie, mais la situation des droits de l’homme s’est détériorée au fil des jours. La montée alarmante des exécutions arbitraires rapproche le pays du modèle de l’Iran voisin, plus que jamais impliqué depuis que les États-Unis ont retiré leurs troupes du pays à la fin de 2011. La Mission des Nations Unies en Irak, comme celle de la Syrie, est plus soucieuse de satisfaire le gouvernement du pays hôte que de s’occuper de ceux qui s’efforcent d’engendrer la démocratie. Et l’UE semble plus présente lorsque des pactes de partenariat commercial sont signés.

Récemment, le gouvernement a officiellement mené 21 exécutions, dont trois femmes en une journée, sur des accusations creuses de terrorisme. Il est allé si loin que la semaine dernière, le vice-président élu du pays, le Dr Tariq al-Hashemi, a été condamné à mort par contumace pour participation présumée à des activités terroristes. Critique du régime iranien, il a cherché refuge en Turquie depuis le début de l’année et le gouvernement pro-iranien de Nouri Al-Maliki a lancé un mandat d’arrêt d’Interpol afin de le récupérer pour l’exécuter par pendaison.

Quelques jours avant l’annonce de sa condamnation à mort, Hashemi avait envoyé une lettre au président Jalal Talabani demandant son intervention « pour arrêter le taux sans cesse croissant des exécutions arbitraires ». Hashemi a également affirmé que plusieurs de ses gardes du corps arrêtés, et qui avait refusé de faire de faux aveux, ont été torturés à mort dans les prisons du gouvernement. Le ministère de la Justice a confirmé 96 exécutions depuis le début de l’année 2012, et 196 autres personnes dans le couloir de la mort. Beaucoup d’Irakiens estiment que le nombre réel est bien plus élevé et les groupes de droits de l’homme ont tiré la sonnette d’alarme. La chef de la politique étrangère pour l’Union européenne, Catherine Ashton, s’est pour l’instant abstenue de condamner la peine de mort visant le vice-président.

Pendant ce temps, le représentant spécial du secrétaire général Ban Ki-moon en Irak, Martin Kobler a été critiqué pour avoir aidé le gouvernement irakien à remplir l’ordre du jour de l’Iran contre des réfugiés iraniens. Le mois dernier, l’un des hauts responsables de l’ONU en Irak Tahar Boumedra – qui a récemment démissionné pour protester contre ce qu’il a vu à la mission de l’ONU en Irak – a révélé comment ses rapports avaient été falsifiés par Kobler avant d’être envoyés aux bureaux de l’ONU à New York, afin d’embellir la réalité.

Plus tôt cette année, Kobler avait suscité la vive réaction de membres du Parlement européen alors qu’il essayait de convaincre la Commission des affaires étrangères du Parlement européen qu’il avait fait du bon travail, en particulier pour les conditions au camp Liberty près de l’aéroport de Bagdad, où ont été relogés plusieurs milliers d’opposants iraniens évacués de leur domicile du camp d’Achraf. Sans liberté de mouvement pour les résidents et aucun accès aux visiteurs, aux parlementaires et aux juristes – le camp Liberty n’est rien de moins qu’un «centre de détention à ciel ouvert », selon un rapport indépendant du groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire.

La semaine dernière, l’émissaire de l’Union européenne en Irak Jana Hybaskova s’est exprimée devant la Commission des affaires étrangères du Parlement européen pour informer les membres de la situation dans la région. Étonnamment, une grande partie de son discours a été consacrée à attaquer les résidents d’Achraf. Elle se plaignait que le parlement leur avait prêté trop d’attention. «Les gens du camp d’Achraf, les Moudjahidine du peuple l– ou OMPI – sont actuellement transférés du camp d’Achraf vers un camp de loin préférable appelé camp Hurriya (liberté) qui est financé par l’Institut pour la stabilité, avec de l’argent européen », a t-elle déclaré.

Sa déclaration n’était pas tout à fait vraie. J’ai suivi en détail le transfert des personnes d’Achraf à Liberty. Aucun gouvernement européen ni aucune institution de l’UE n’a veré un seul dollar pour les besoins des résidents. Toutes les factures ont été payées par les résidents eux-mêmes ou leurs familles et sympathisants à l’étranger. L’eau, l’électricité, la nourriture, le carburant et tous les autres besoins sont achetés à des prix souvent bien plus élevés que le marché irakien car beaucoup doivent être commandé à l’étranger – puisque l’Irak refuse l’accès des habitants au marché irakien. Ces derniers mois, les résidents ont dépensé plus de 6 millions de dollars en carburant pour alimenter les générateurs d’énergie et pour l’approvisionnement en eau, le camp n’étant pas connecté au réseau d’eau urbain et l’eau devant être acheminée par camions citernes.

Il est vraiment immoral pour un responsable de l’UE d’essayer d’induire en erreur le Parlement de cette façon. J’ai travaillé avec Hybaskova quand elle était eurodéputée et j’ai gardé d’elle de bons souvenirs. Je suis donc d’autant plus déçu par sa présentation la semaine passée. L’an dernier, sous la pression de Téhéran, l’Irak avait lancé une attaque meurtrière contre Achraf, ouvrant le feu sur les réfugiés non armés. Quelque 36 résidents avaient été tués, dont huit femmes. Des centaines d’autres ont été blessés, dont beaucoup handicapés à vie. Le Parlement européen a adopté plusieurs résolutions appelant l’Irak à traiter humainement les résidents.

Ashton elle-même a demandé à l’Irak de mener une enquête indépendante sur le massacre. Mais cette enquête n’a jamais eu lieu. Au lieu de cela un nouveau pacte commercial a été signé avec l’Irak et le gouvernement a été félicité pour sa «flexibilité» – en d’autres termes, pour s’abstenir de nouvelles attaques meurtrières contre les réfugiés. Il est temps que l’UE cesse de fermer les yeux sur les réalités et arrête de faire l’éloge du gouvernement irakien, alors qu’il est de plus en plus clair que le pays s’est transformé en un satellite du régime des mollahs à Téhéran.

Ryszard Czarnecki, eurodéputé, est un membre du groupe des Conservateurs et Réformistes européens et ancien ministre polonais des Affaires européennes.