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La censure du ministre de l’économie révèle de profondes fractures au sein du régime iranien

La censure du ministre de l’économie révèle de profondes fractures au sein du régime iranien
Abdolnaser Hemmati, ministre de l’Économie iranien, alors que les députés débattent de sa censure au Majlis – Le 2 mars 2025

Le parlement du régime iranien a voté la censure du ministre de l’Économie Abdolnaser Hemmati le 2 mars 2025, marquant une escalade significative dans la lutte de pouvoir interne du régime. Après une séance houleuse, au cours de laquelle le président du régime, Masoud Pezeshkian, et Hemmati lui-même ont tenté de défendre son bilan, les députés ont adopté à une écrasante majorité la motion par 183 voix pour, 89 contre et une abstention. Avec ce vote, le mandat de Hemmati en tant que ministre de l’Économie a pris fin après moins de sept mois de mandat, faisant de lui le premier ministre à être évincé du gouvernement fragile de Pezeshkian. Cependant, cette censure est loin d’être un simple conflit politique : elle expose les fractures croissantes du régime, alors que les factions rivales cherchent des boucs émissaires pour protéger le guide suprême du régime, Ali Khamenei, tout en utilisant simultanément la crise pour régler des comptes internes et tromper une société agitée au bord de l’explosion.

Une confrontation politique pour dissimuler le rôle de Khamenei
Le parlement iranien, dominé par des factions extrémistes proches de Khamenei, a accusé Hemmati de ne pas avoir réussi à contrôler l’inflation, à stabiliser la monnaie et à empêcher la chute libre de l’économie. Pourtant, le président du régime, Masoud Pezeshkian, défendant son ministre, a reconnu que l’instabilité financière de l’Iran échappe au contrôle du gouvernement. « Dès le premier jour, nous avons été confrontés à des déséquilibres économiques fondamentaux », a-t-il déclaré aux parlementaires, ajoutant que l’Iran est « engagé dans une guerre à grande échelle » alors que des pays comme le Qatar, l’Irak et la Turquie refusent de restituer les actifs iraniens.

Les remarques de Pezeshkian ont par inadvertance mis en lumière une vérité que le régime cherche à occulter : le rôle du gouvernement dans l’élaboration de la politique économique est minime. Les décisions financières et économiques majeures – allant de la politique monétaire au commerce extérieur et à l’évasion des sanctions – sont dictées par le bureau de Khamenei, et non par le ministre de l’Économie ou même par le président. La faction qui pousse à la censure de Hemmati en est bien consciente, mais cherche à utiliser sa censure comme une manœuvre politique pour renforcer sa propre position tout en induisant le public en erreur sur la responsabilité du régime.

Hemmati : le bouc émissaire commode
Hemmati, pour sa défense, a souligné des problèmes structurels plutôt que des échecs personnels. Il a assuré aux parlementaires que le taux de change, qui oscille actuellement autour de 91 000 tomans pour un dollar, se stabiliserait et a fait valoir que les turbulences économiques de l’Iran sont le produit de changements géopolitiques plus vastes. « Les événements en Syrie et au Liban, la perte de dirigeants majeurs de la résistance et la guerre économique directe de Trump » ont tous contribué à la crise actuelle, a-t-il déclaré.

Malgré ces justifications, la censure de Hemmati n’a jamais été une question de compétence économique. Sa censure est un calcul politique des factions extrémistes qui voient une opportunité de purger des personnalités associées aux administrations précédentes tout en protégeant Khamenei de toute responsabilité. En concentrant l’attention sur un seul ministre, ils visent à fabriquer l’illusion que les échecs politiques proviennent de la mauvaise gestion du gouvernement plutôt que de la corruption systémique et de la mauvaise gouvernance.

Luttes parlementaires et lutte pour le pouvoir
La tentative de censure a également mis à nu la corruption interne au sein du régime. Des rapports ont fait surface selon lesquels des législateurs ont été soudoyés pour soutenir ou retirer leur signature de la pétition de censure. Pezeshkian, qui a senti les motivations politiques derrière cette décision, a critiqué le spectacle en déclarant : « Si changer les individus pouvait résoudre nos problèmes, alors pourquoi cela n’a-t-il pas fonctionné auparavant ? » Ses commentaires ont souligné la futilité du cycle sans fin de remaniement des fonctionnaires du régime tout en ignorant les causes profondes de l’effondrement économique.

Pendant ce temps, le député Mohammad Qasim Osmani, un opposant à la censure, a averti que le retrait de Hemmati ne ferait qu’aggraver l’instabilité. « C’est le seul gouvernement qui a hérité de circonstances aussi extraordinaires. Au lieu de le renverser, nous devrions le soutenir », a-t-il soutenu.

Un régime désespéré face à une société explosive
Au-delà des luttes intestines entre factions, la véritable crise à laquelle le régime est confronté est la colère croissante du peuple iranien. Le drame de la censure est une tentative de détourner l’attention de l’inflation galopante, de la pauvreté généralisée et d’un système économique paralysé par la corruption et la mauvaise gestion. Hemmati lui-même a reconnu que « au cours des sept dernières années, 10 millions de personnes sont tombées sous le seuil de pauvreté », un aveu stupéfiant de l’échec du régime.

Malgré le théâtre politique, toutes les factions – y compris celles qui ont orchestré la censure de Hemmati – sont parfaitement conscientes que le mécontentement de la population atteint un point de rupture. L’escalade de la répression, les arrestations massives et les exécutions sont le signe de la crainte d’une agitation sociale imminente. Le spectacle de la censure est, au fond, une tentative de pacifier une population en colère pendant que des factions rivales se battent pour s’imposer dans les coulisses.

Pourtant, comme l’a montré l’histoire, désigner des responsables comme boucs émissaires ne suffira pas à freiner le déclin du régime. Le peuple iranien est bien conscient que Khamenei et son entourage proche – et non un seul ministre – sont responsables de ses souffrances. La véritable crise à laquelle la dictature cléricale est confrontée n’est pas seulement l’effondrement économique, mais la prise de conscience croissante parmi ses citoyens que le système tout entier est irréversible.