jeudi, mars 28, 2024
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Audition à la Chambre des Communes canadienne sur le camp d’Achraf

Commission des Affaires étrangères – Sous-commission des droits internationaux de la personne. Audition du Colonel Wesley Martin, Commandant des forces de protection d’Achraf

Scott Reid, président de séance
Nous avons aujourd’hui comme témoin le colonel Wesley Martin de l’armée américaine pour parler de la situation au camp d’Achraf. Le colonel Martin a été commandant du camp et a eu d’autres expériences en Irak et dans d’autres zones et il est en mesure de faire une grande lumière à ce sujet. Colonel je me tourne vers vous.

Colonel Wesley Martin : J’ai été le premier officier de la force anti-terroriste de la coalition en Irak, en tant qu’ancien officier opérationnel et en tant que premier colonel à commander au camp d’Achraf, je ne pourrais assez insister pour dire que l’OMPI n’est pas une organisation terroriste.

Comme nous le savons il y a eu en avril passé une attaque sauvage au camp d’Achraf. Cela a été très bien montré par des vidéos. J’espère que tout le monde a eu le l’occasion de voir ces vidéos. En cas contraire, je vous recommande de le faire. Dans ces vidéos on peut voir des personnes sans armes écrasés par des blindés militaires de fabrication américaine et qui étaient tués de sang froid par des soldats américains. Une autre chose que j’ai vu également, c’est que les habitants d’Achraf se précipitaient pour aider leurs amis tombés à terre sans tenir compte des balles ni des véhicules et tout en sachant qu’ils pouvaient très bien être le prochain à mourir.

En février dernier, l’ambassadeur Jeffrey a témoigné devant les sénateurs Levin et McCain disant qu’il était certain que Maliki tiendrait parole et protègerait les résidents d’Achraf. Les forces de Maliki avaient déjà attaqué Achraf une première fois. Deux mois plus tard, ce fut l’attaque du 8 avril.

Alors que nous parlons, Maliki soumet les résidents d’Achraf à une torture psychologique continue avec des haut-parleurs qui privent les habitants de sommeil et les forcent à écouter des messages qui les offensent. Le soutien logistique et médical est interdit d’entrer au camp. Les victimes de l’attaque qui avaient des plaies ouvertes et des fractures des membres, doivent endurer les souffrances sans sédatifs ni médicaments pour empêcher les infections.

Le mois dernier, Maliki a fait connaitre ses intentions par écrit à l’Union européenne. Une copie de ce document est jointe à mon témoignage.

Les Nations Unies ont reconnu les résidents d’Achraf comme des demandeurs d’asile mais Maliki a bloqué toute action comme il a bloqué la délégation du Congressman Rohrabacher qui voulait visiter Achraf.

Un des instruments majeurs qu’il continue d’utiliser pour justifier son action est la classification de terroriste. Maliki a déclaré que le camp d’Achraf devait être évacué par les Moudjahidine du peuple d’Iran avant la fin de l’année. Il a déjà rebaptisé le camp du nom de « Nouvel Irak ». Beaucoup de gens ont demandé à Maliki de retirer cette date butoir du 31 décembre et de permettre aux représentants du HCR d’entrer dans le camp pour terminer leur travail et transférer les habitants. Jusque là, ils ont besoin d’avoir à leurs côtés des forces de maintien de la paix.

Les attaques en 2009 et 2011 ont immédiatement suivi la visite du Secrétaire américain à la défense Gates. La semaine prochaine il rencontrera le président Obama. Dès qu’il rentrera des Etats-Unis, ce qu’il pourra faire croire, c’est que cette opération a reçu l’aval des USA.

Malheureusement nous sommes entrés en Irak sans bien connaitre la région. Cette fois le gouvernement s’aligne de plus en plus sur l’Iran. Khomeiny avait dit un jour que la route de Jérusalem passe par Karbala.

Nous avons joué un rôle crucial pour ouvrir cette voie. Nous avons commis de nombreuses erreurs et beaucoup de gens ont payé le prix ultime pour ces erreurs. A moins que des mesures favorables ne soient prises rapidement, les 3400 résidents d’Achraf seront les prochains à payer la note.

Merci pour votre invitation et je vais répondre à vos questions.

Scott Reid : nous allons commencer par une question du côté du gouvernement.

Russ Hiebert, président de la sous-commission de droits internationaux de la personne : Merci colonel, je vous remercie pour votre témoignage. Il est bon d’entendre quelqu’un qui a été sur le terrain et qui a vu les choses de près. Dans votre témoignage, vous parlez des arguments qu’avancent les autres. Est-ce que vous pourriez pour la sous-commission donner tous les arguments que les autres avancent pour que (l’OMPI) soit maintenue sur la liste des organisations terroristes et expliquer à la commission ces préoccupations. Juste les inquiétudes qui ont été soulevées et votre avis à ce sujet.

Colonel Wesley Martin : L’OMPI a été fondée en 1965 par un groupe d’étudiants qui avaient fait des études. Et ils sont arrivés à la conclusion qu’il devrait y avoir une égalité entre les dirigeants et ceux qui sont dirigés. Les religieux ne doivent pas avoir le dernier mot dans l’interprétation du Coran. Les religieux ne doivent pas attendre d’obéissance aveugle de la part de la congrégation. D’accord cela ressemble à Marx et Lénine. Mais cela ressemble aussi à Jefferson et Madison quand ils ont rédigé notre déclaration d’indépendance et notre Constitution.

Uniforme
Un des commentaires fait spécialement sur le camp d’Achraf, c’est qu’ils portaient tous le même genre de vêtements. Or nous parlons d’une armée de libération nationale. Bien évidemment, dans notre propre armée, on porte aussi tous les mêmes vêtements.

Divorce
Puis vient la question du divorce et le fait qu’ils vivent séparément les uns des autres. Vu ce qui se passe avec l’OMPI actuellement au camp d’Achraf, c’est une bonne chose. Et Massoud Radjavi a vu l’intensité du problème dans les batailles à venir et s’il avait dû s’occuper d’un groupe d’enfants avec toutes ces attaques potentielles, cela aurait rendu le problème bien plus complexe. Heureusement, il n’y a pas d’enfants au camp d’Achraf. Il y a des d’adolescents, peut-être, une des jeunes femmes tuées et montrée dans la vidéo avait 20 ans. Mais il s’agit des plus jeunes. Les prêtres ne se marient pas, mais on ne les taxe pas de secte.

Aussi quand on commence à écarter les diverses accusations portées à leur encontre, elles s’évanouissent presque complètement.

Gardés contre leur volonté
On dit aussi qu’on les garde contre leur volonté. Je me rendais partout dans le camp et je serrai la main à tous ceux à qui je rendais visite. Et parfois on ne prévenait pas l’OMPI très à l’avance de ces visites. Et je vais en expliquer une dans une minute. Et je serrais la main d’un maximum de personnes et s’ils voulaient partir ils pouvaient me retenir la main.  Et on sortait. Nous avions aussi deux accords écrits. L’OMPI ne voulait pas garder les gens qui voulaient partir.

Centre d’entrainement
Et la dernière rumeur que je peux aborder et que je dois personnellement récuser. J’avais reçu un message du département d’Etat. Je venais juste de rentrer d’Allemagne et il disait que l’OMPI avait un centre d’entrainement dans leur quartier résidentiel et que c’était exactement dans ce lieu.

A cette époque ils recrutaient des Irakiens. J’ai donné l’ordre à mes Marines de monter en voiture et nous étions prêts à aller directement dans ce quartier résidentiel. Un des officiers m’a dit : « colonel, vous pouvez allez dans n’importe lequel de leur bâtiment, quand vous le voulez, vous n’avez pas besoin d’emmener vos Marines. » J’ai dit : « d’accord, j’emmène un lieutenant avec moi et on va dans ce quartier résidentiel maintenant.  Et si je vois que ce que le département d’Etat me dit est vrai, le reste des Marines viendra. »

Nous sommes allés dans ce quartier et ce que nous avons trouvé, c’est un site où des ouvriers vivaient. Ils employaient de nombreux ouvriers de la région. Les ouvriers de la région venaient le lundi et travaillaient toute la semaine. S’ils partaient chaque soir et revenaient le matin, ils avaient de grandes chances d’être capturés par de vraies organisations terroristes, Al-Qaïda, l’armée du Mahdi, la brigade Badr et d’être exécutés. Aussi pour leur sécurité, ils avaient un logement, installé là.

J’y suis allé. Il n’y avait pas une centaine de personnes. Il y en avait entre 50 et 80. Je suis allé dans chaque bâtiment, sauf un. Et alors que je partais, l’officier de liaison m’a dit : « Colonel vous n’avez pas vérifié ce bâtiment ». J’ai répondu : « J’en ai vu assez. Je sais ce qui ne se passe pas ici. » Il a dit : « colonel, vous pouvez me faire plaisir. S’il vous plait, vérifiez ce bâtiment aussi ». Alors j’y suis allé et j’ai inspecté le bâtiment. Il n’y avait que des ouvriers qui étaient autorisés à y vivre en toute sécurité de manière à ne pas se mettre en plus grand danger. Et s’ils avaient eu quelque chose à cacher, il ne m’aurait pas dit « colonel vous n’avez pas vérifié ce bâtiment. »

Je suis reparti en me sentant parfaitement stupide du fait que ce rapport du Département d’Etat m’avait fait rassembler mes Marines pour lancer un raid sur ce quartier. J’ai beaucoup appris cette nuit-là.