Le débat sur la double nationalité parmi les responsables du régime intégriste est devenu un champ de bataille dans la lutte de pouvoir entre factions dirigeantes en Iran. Au centre de la tempête se trouve l’administration de Massoud Pezeshkian, accusée par des membres de la faction Jebheh Paydari de nommer des responsables dont les membres de la famille ont la double nationalité, une mesure qui, selon eux, viole la loi iranienne et ouvre la voie à l’influence étrangère.
La nomination de Mohammad Javad Zarif a suscité une vive réaction de la part des députés, dont Hamid Rasaï, Mehdi Kuchakzadeh et Kamran Ghazanfari. Les critiques, notamment Rasaï, ont ouvertement appelé au renvoi de Zarif en raison de la double nationalité de ses enfants, avertissant le président que s’il n’agissait pas, le Parlement interviendrait en utilisant des mesures juridiques. Ghazanfari est allé plus loin, menaçant d’engager des poursuites judiciaires contre le président lui-même pour avoir soutenu la nomination de Zarif, suggérant même que cela pourrait conduire à la destitution du président.
Malgré les premiers signaux du guide suprême du régime, Ali Khamenei, transmis par son bureau, suggérant une flexibilité potentielle sur la législation controversée, la faction Jebheh Paydari – exclue et mise à l’écart de tout rôle dans l’administration multifactionnelle et avide de parts de Pezeshkian – a résolument refusé de céder.
Tollé parlementaire
Le 3 décembre, le représentant de Jebheh Paydari, Qasem Ravanbakhsh, a fustigé Zarif, déclarant : « La loi de 2021 interdit aux binationaux d’occuper des postes sensibles, mais Zarif occupe non seulement un tel poste illégalement, mais prône également des négociations au-delà de la question nucléaire, potentiellement sur les missiles. Le Parlement censé superviser ces questions est tenu dans l’ignorance des négociations de Vienne. Le président Ghalibaf doit exiger des comptes du président pour avoir violé à la fois la Constitution et la loi parlementaire. »
Le député Hamid Rasaee a accusé le vice-président Aref d’avoir violé la loi en raison de la double nationalité de son enfant, déclarant sur la plateforme X : « En plus de Zarif, Aref est également légalement interdit d’exercer des fonctions en raison de la citoyenneté américaine de sa famille. La loi est explicite, et ces individus doivent démissionner immédiatement. »
Ajoutant au tollé, le député Amirhossein Sabati a déclaré : « Des rapports récents indiquent qu’en dehors de Zarif, au moins trois autres vice-présidents de l’administration Pezeshkian ont également des membres de leur famille ayant la double nationalité. Le bureau de l’inspecteur général doit enquêter et mettre un terme à ce scandale. »
Zarif : défi face à l’opposition
Au milieu d’une pression croissante, Zarif reste provocateur. Dans des commentaires rapportés par les médias d’État, il a rejeté les allégations, soulignant que son service continu était sous la direction du président Pezeshkian : « Je préfère ne pas m’engager dans ces discussions. Après avoir consulté le président Pezeshkian, j’ai reçu pour instruction de poursuivre mon travail et de ne pas me laisser distraire par ces questions. »
Ce refus a suscité de vives critiques de la part des opposants. Rasaee a averti que si Pezeshkian n’agissait pas, le Parlement pourrait utiliser son autorité pour destituer Zarif. Entre-temps, le président Ghalibaf a publiquement critiqué la nomination de Zarif, suggérant qu’il devrait se retirer jusqu’à ce que les ambiguïtés juridiques soient résolues : « Si j’étais à la place de Zarif, je dirais au président de m’autoriser une absence temporaire jusqu’à ce que le Parlement résolve la question. Son rôle actuel est juridiquement indéfendable. »
Cette controverse souligne une lutte politique plus large entre les pouvoirs exécutif et législatif. La faction Jebheh Paydari a culminé avec un vote parlementaire décisif contre les amendements à la loi sur les nominations à des postes sensibles, avec 207 députés votant contre les changements proposés. Ces développements reflètent un affaiblissement plus important de l’autorité autrefois inattaquable du Guide suprême.
Un bourbier politique et juridique
Le journal Farhikhtegan, affilié à Ali-Akbar Velayati, un conseiller de Khamenei, s’est dit préoccupé par les ramifications de l’application de la loi sur la double nationalité. Malgré les mises en garde contre une mauvaise gestion de la question et des risques tels que la fuite des capitaux d’Iran, le journal a déclaré : « La question de la double nationalité a toujours été un sujet sensible et controversé en Iran, en particulier en ce qui concerne les nominations à des postes sensibles. Elle suscite des inquiétudes quant à un éventuel abus ou à une infiltration. »
Dans sa conclusion, Farhikhtegan a mis en garde la faction Jebheh Paydari : « Un comportement factionnel qui amplifie les questions secondaires au lieu de résoudre les vrais problèmes constitue un obstacle au développement et à la sécurité du pays. Si les groupes politiques donnent la priorité aux intérêts partisans au détriment de la nationalité… la souveraineté nationale sera inévitablement sacrifiée. »
Alors que le conflit s’intensifie, des questions clés restent sans réponse. L’administration de Pezeshkian sera-t-elle poussée à la soumission par la pression incessante de la faction Jebheh Paydari, ou cherchera-t-elle à impliquer directement le guide suprême Khamenei pour sortir de l’impasse ? Quel que soit le résultat, l’intensification de la lutte pour le pouvoir au milieu de crises nationales, régionales et internationales critiques laisse présager une période tumultueuse à venir, non seulement pour le gouvernement de Pezeshkian ou Jebheh Paydari, mais pour le régime dans son ensemble.