jeudi, mars 28, 2024
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Isoler le régime belliqueux d’Iran

De Jubin Afshar*

Isoler le régime belliqueux d’IranAmerican Chronicle – Ces dernières semaines, un chœur de voix influentes dans les cercles de politique étrangère aux Etats-Unis et en Europe a exprimé son inquiétude concernant ce que certains considèrent comme la « marche vers la guerre » de l’administration Bush, lançant des appels insistants pour un dialogue direct entre les Etats-Unis et « l’Etat soutenant le terrorisme le plus actif » du monde.

 

L’appel au dialogue avec Téhéran a été émis par Sandy Berger, ancienne conseillère à la sécurité nationale du président Bill Clinton, Zbigniew Brzezinski, ancien conseiller à la sécurité nationale du président Jimmy Carter, Patrick J. Buchanan, influent chroniqueur conservateur, George Perkovich, vice-président de Carnegie Endowment for International Peace, Madeline Albright, secrétaire d’Etat de l’ancien président Bill Clinton, les sénateurs Chuck Hagel (républicain du Nebraska) et Richard Lugar (républicain de l’Indiana), parmi d’autres.

Le Financial Times, voix éternelle du dialogue avec les mollahs de Téhéran, a commencé sa page d’éditorial le 15 mai en déclarant que « La conclusion d’un grand marché est l’unique solution avec l’Iran ». Il a affirmé : « Nous avons maintenant l’opportunité de retourner la situation aux dépens de Téhéran : proposer une offre qui reconnaît que les Iraniens ont des préoccupations légitimes concernant leur sécurité tout en admettant que les autres en ont aussi. Ainsi, la menace réaliste selon laquelle l’Iran risque de s’isoler du monde doit être accompagnée d’une offre sérieuse de négociation ».

La question toutefois est de savoir si le régime d’Iran est prêt à négocier et quoi ?

Les troubles causés par le fait de garantir aux tyrans iraniens leur sécurité et de leur promettre que personne ne veut d’un « changement de régime » en échange de leur bonne volonté et de leur coopération indiquent que la raison de cette grave crise du 21ème siècle n’a pas été comprise. L’argument est à peu de choses près le suivant : les Etats-Unis ne sont pas en faveur de négociations et menacent implicitement l’Iran d’un changement de régime, disposent de près de 150000 soldats aux frontières ouest et est de l’Iran, et Téhéran est préoccupé pour sa sécurité ce qui l’oblige à poursuivre un programme d’armes nucléaires et à avoir un comportement belliqueux. Pour parvenir à changer le comportement du régime iranien, les Etats-Unis doivent engager directement le régime iranien dans un grand marché afin d’acheter sa bonne volonté en promettant au régime la sécurité qu’il désire, afin d’obtenir un partenaire obéissant et d’assurer la stabilité de la région.

Cet argument repose sur un malentendu, ou l’absence de malentendu, à propos de la nature de l’actuel régime iranien et ne tient pas compte des leçons des trois dernières décennies de loi fondamentaliste islamique en Iran. Le régime iranien poursuit-il vraiment un programme d’armes nucléaires pour se défendre face aux menaces américaines ? Les menaces continuelles d’Ahmadinejad aux autres pays et son appel à « une loi islamique mondiale » sont-ils les résultats de ces menaces perçues par l’Iran ? Le terrorisme soutenu par les Iraniens et la propagation de son fondamentalisme religieux régressif et fanatique, sont-ils dus à quelque impulsion extérieure ?

Les trois dernières décennies de loi fondamentaliste islamique en Iran montrent que le régime prospère grâce la confrontation et aux menaces extérieures afin de supprimer toute dissidence et se consolider intérieurement, précisément parce qu’il est incapable de gérer un système de gouvernement moderne, prospère, ouvert et démocratique.

L’accès à la technologie nucléaire par le régime, suspecté par beaucoup de vouloir développer des armes nucléaires, a commencé dans le secret le plus total à la fin des années 1980 et a été divulgué par l’opposition, le Conseil national de la Résistance iranienne (CNRI) pendant l’été 2002.

L’intervention de Téhéran au Liban dans son soutien au terrorisme a débuté au début des années 1980, ce qui indique clairement que le terrorisme est un instrument de politique étrangère majeur pour le régime afin d’intimider et de faire chanter différents pays et les faire accepter ses conditions.

Téhéran a ouvertement déclaré son ambition de devenir le leader du « monde islamique » et de former un « bloc islamique » afin d’imposer le modèle iranien de gouvernement religieux à l’Irak, l’Afghanistan et à d’autres pays. Ce « califat islamique » serait armé de bombes nucléaires et de missiles à longue portée pour imposer ses conditions sur un monde qui regarde faire de manière incrédule et qui cherche à négocier et à marchander avec un Etat soutenant le terrorisme de plus en plus sûr de lui et agressif.

Que pourrait donc négocier l’Iran ? Le régime iranien a dit à plusieurs reprises qu’il était d’accord pour négocier, mais seulement selon son ordre du jour et selon ses propres conditions. Dans le même esprit, il a juré maintes et maintes fois de ne jamais suspendre l’enrichissement nucléaire. Ce qu’il veut négocier, c’est la façon dont l’Occident pourrait l’aider à asseoir son influence dans la région, à acquérir la capacité nucléaire, à se retirer de la région et à abandonner toutes négociations sur l’établissement de la démocratie au profit d’un dominion islamique.

C’est donc là que repose l’erreur de l’argument en faveur d’un engagement dans des pourparlers. Le régime iranien dit : négocions sur la façon dont vous pouvez sauver votre peau et partir de la région sains et saufs, plutôt que sur notre changement de comportement. On ne peut s’attendre à aucun changement de comportement à l’issue de telles négociations et le régime va se servir de ce temps pour franchir le point de non-retour dans son programme d’armes nucléaires.

La seconde erreur repose dans le fait que cet engagement est le modus operandi remontant aussi loin qu’au fiasco de l’Irangate au milieu des années 1980, les Européens et les Américains s’engageant avec l’Iran d’une manière ou d’une autre et fermant les yeux sur les violations des droits humains du régime dans le pays et son soutien au terrorisme à l’étranger. L’engagement, par conséquent, n’est pas une idée nouvelle mais une vieille politique infructueuse qui a en fait débouché sur l’ascension d’Ahmadinejad et du Corps des Gardiens de la Révolution islamique, consolidant l’influence des radicaux au sein du régime iranien. Si la menace d’une confrontation militaire dans le Golfe Persique est aussi imminente aujourd’hui, c’est parce qu’elle est la conséquence d’une telle politique d’apaisement dans le passé.

La troisième erreur est que cela envoie précisément le mauvais message à la population iranienne furieuse et agitée qui ne soutient pas le régime et qui ne soutient pas non plus son programme nucléaire.

Le monde doit s’unir face à cette nouvelle dictature orientale religieuse et l’isoler plutôt que lui donner plus de légitimité avec des engagements futiles. Les Iraniens méprisent le régime, et malgré le mythe du sentiment nationaliste iranien réunissant les masses autour du drapeau iranien concernant la question nucléaire, ils ne soutiennent pas le régime dans sa position de confrontation actuelle. Les 4000 mouvements de protestation en Iran contre le régime pendant l’année iranienne passée qui s’est achevée en mars prouvent qu’il existe un fossé large et profond entre les dirigeants iraniens et la population. Le monde doit reconnaître cette résistance à la loi islamique fondamentaliste en Iran et éviter d’offrir aux mollahs plus de faveurs en promettant des garanties de sécurité. Pourquoi est-ce que l’on devrait proposer de protéger ce régime de son inévitable chute entre les mains du peuple iranien ? Au contraire, la pression internationale sur la tyrannie religieuse en Iran doit être augmentée et l’administration américaine doit s’engager envers la résistance iranienne et son peuple au lieu de menacer d’une action militaire. La guerre n’est pas inévitable tant que l’on fuit l’apaisement (soit l’engagement, les négociations, les grands marchés, etc.).

La meilleure solution reste la troisième option de Maryam Radjavi, présidente élue de la Résistance iranienne, définie dans son discours au Parlement européen en décembre 2004 et au Conseil de l’Europe en avril 2006. « Je suis venue pour dire que la communauté internationale n’a pas à choisir entre des mollahs armés nucléairement et la guerre », a-t-elle dit. « Il existe une troisième option : un changement démocratique amené par les Iraniens et leur résistance organisée… Faire des concessions aux mollahs n’est pas une façon d’éviter la guerre. Mais cela augmente la probabilité d’une guerre. »

L’Occident doit suivre son conseil avant qu’il ne soit trop tard.

Jubin Afshar, est directeur du Projet sur le Moyen Orient au Near East Policy Research à Washington.