vendredi, novembre 28, 2025
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Bouleversements économiques : les craintes du régime iranien

Bouleversements économiques : les craintes du régime iranien
Manifestation des retraités d’ITC à Téhéran le 19 mai 2025

Les signaux économiques envoyés cette semaine par le régime iranien révèlent un système qui resserre frénétiquement son emprise, pris entre un effondrement budgétaire inévitable et la menace de troubles sociaux. Le samedi 22 novembre 2025, le gouvernement a finalisé une multiplication par quatre du prix de l’essence super importée. Simultanément, des millions de retraités ont été privés de leur assurance maladie complémentaire à compter du 22 novembre.

Ces actes de pénurie simultanée et de luxe sélectif – l’État privilégiant les voitures de luxe importées au détriment des soins de santé des retraités – soulignent une crainte stratégique profonde : celle que l’anniversaire des manifestations de 2019 ne soit déclenché par les difficultés économiques que le régime lui-même intensifie. Le régime tente de gérer une économie que ses propres dirigeants reconnaissent comme étant fondée sur un pillage systématique.

Gouvernance de la pénurie

La suppression brutale de l’assurance maladie complémentaire pour des millions de retraités est une mesure radicale visant à combler les déficits financiers immédiats du régime, faisant peser le fardeau sur les plus vulnérables. Cette rupture est due à l’incapacité de l’Association des retraités à conclure un nouveau contrat avec la compagnie d’assurance Atiyeh Sazan Hafez et l’Organisation de la sécurité sociale.

Le problème résidait dans la forte augmentation des primes. Ahmadi Panjaki, membre du conseil d’administration de l’association des retraités, a déclaré que la cotisation mensuelle précédente s’élevait à 300 000 tomans, répartis équitablement entre l’association et les retraités. Le nouveau contrat proposé, en revanche, prévoit des cotisations échelonnées, la plus basse étant fixée à 509 000 tomans, soit une augmentation de près de 70 %, rendant ainsi la couverture complémentaire essentielle inabordable pour de nombreux citoyens âgés vivant de maigres pensions. En faisant peser le fardeau financier sur les retraités, le gouvernement Pezeshkian a sacrifié la stabilité de millions de foyers au profit d’un soulagement budgétaire à court terme, démontrant ainsi son indifférence manifeste au bien-être de sa population fidèle.

Choc des carburants : Files d’attente, prix et prémices

La décision radicale concernant l’essence super, annoncée le 22 novembre 2025, constitue un prélude soigneusement orchestré à une « réforme » plus large des prix des carburants. Selon les rapports officiels, le prix de base de l’essence super importée sur le marché de l’énergie a été fixé à 65 800 tomans le litre. Les experts estiment que le prix final pour le consommateur, incluant les frais de distribution et de station-service, se situera entre 71 000 et 75 000 tomans le litre. Ce prix représente environ 0,65 à 0,68 dollar américain, sur la base du taux de change actuel d’environ 110 000 tomans pour un dollar.

Le gouvernement a immédiatement tenté d’apaiser les tensions en distinguant ce prix des paliers subventionnés existants (1 500 et 3 000 tomans le litre). La porte-parole de Pezeshkian, Fatemeh Mohajerani, a insisté sur le fait que ce nouveau palier, plus onéreux, était « totalement indépendant » et n’aurait aucune incidence sur le prix des biens essentiels ni sur les paliers subventionnés existants.

Cependant, cet argument est largement rejeté. Cette mesure est perçue comme la création d’un plafond tarifaire et un prélude à une hausse du prix de tous les carburants, une étape inévitable compte tenu des difficultés rencontrées par le gouvernement pour financer les quelque 21 milliards de dollars de subventions annuelles à l’essence. Les données officielles, et même les analyses proches du régime, tendent à minimiser la gravité de la crise, notamment en réduisant l’effet d’entraînement inflationniste que même les prix élevés des carburants peuvent avoir sur l’ensemble de l’économie. En introduisant un troisième palier extrêmement cher, le régime teste le terrain et crée un prix plancher non subventionné, sapant ainsi la confiance dans la stabilité des prix de tous les carburants.

Le lien entre coercition et pillage

La réponse du régime aux protestations économiques prévisibles est une escalade immédiate de la coercition, destinée à étouffer toute contestation avant même qu’elle ne commence. La principale crainte est le pouvoir unificateur d’un effondrement économique.

La coercition, pourtant nécessaire, est compromise par l’ampleur de la corruption révélée cette semaine. L’économiste Hossein Raghfar, proche du pouvoir, a révélé le cas choquant de 400 voitures de luxe Porsche importées au nom d’une seule femme âgée, soulignant que tout le monde, du pouvoir judiciaire au Parlement, est au courant, mais que « personne n’ose s’y opposer ».

Dans un aveu encore plus accablant, l’économiste Saeed Leilaz, lui aussi affilié à des factions pro-étatiques, a publiquement confessé que la structure gouvernementale était devenue une « société par actions interfactionnelle servant à piller les biens du peuple », affirmant que les tenants des principes et les soi-disant réformateurs étaient tous complices de ce pillage.

Vol systématique de milliards de dollars.

Ces révélations démontrent que l’architecture même de la gouvernance repose sur un pillage systématique, cause profonde de la pénurie. Le recours du régime aux avertissements et aux critiques des fonctionnaires n’est qu’une tactique de préservation, visant à faire croire que le problème vient de quelques individus mal intentionnés plutôt que de la structure corrompue qui les a engendrés.

Points de tension dans la rue

L’incapacité systémique à garantir la sécurité économique de base est le véritable moteur des troubles potentiels. La persistance du désespoir est illustrée par les manifestations de travailleurs et de bénévoles contre le non-paiement des salaires et le chômage – les mêmes conditions qui ont conduit à la situation financière tragique de personnes comme Ahmad Baledi et Shahou Safari ces dernières semaines.

Le choix du régime d’allouer de précieuses devises étrangères à l’achat de 400 voitures de luxe plutôt qu’à des médicaments essentiels n’est pas une erreur économique ; c’est une prise de position politique qui privilégie la loyauté de l’élite au détriment du bien-être de la population.

Le régime est désormais pris au piège d’une réalité incontournable : il ne peut rationner efficacement les ressources tout en convainquant le public de sa compétence ou de sa bonne volonté. Le double choc de la hausse des prix du carburant et de l’abandon des retraités garantit que chaque mesure de restriction sera perçue comme une volonté de l’élite dirigeante de s’enrichir aux dépens du peuple, accélérant ainsi une érosion irréversible de sa légitimité.