Le mois dernier, la justice iranienne a arbitrairement ajouté 11 mois à la peine de prison de Saïd Sangar, après avoir précédemment prolongé sa peine de 18 à 20 ans. Au moment où la dernière prolongation a été annoncée, il était déjà derrière les barreaux depuis plus de 20 ans, après avoir été arrêté pour la première fois en août 2000 avant d’être poursuivi pour «guerre contre Dieu» et contacts avec l’Organisation des Moudjahidine du peuple d’Iran (OMPI-MEK).
Sangar est l’un des plus anciens prisonniers politiques iraniens, et la double prolongation de sa peine rappelle de nombreux autres cas dans lesquels les autorités ont interrompu une libération programmée afin d’exercer une pression psychologique supplémentaire sur le détenu pour l’empêcher de reprendre ses activités politiques en dehors de la prison.
Au cours des deux décennies passées à la prison d’Evine de Téhéran et à la prison centrale d’Ourmia, Sangar a été soumis à diverses formes de torture, dont 13 simulacres d’exécutions. Le Conseil national de la résistance iranienne (CNRI) a qualifié l’acharnement inhumain dont il est victime de «représailles» pour son refus de désavouer ses convictions et pour avoir publié des déclarations publiques condamnant les excès du régime intégriste.
Téhéran utilise depuis longtemps la torture et les menaces contre les familles des prisonniers afin d’obtenir de faux aveux qui sont ensuite diffusés dans les médias d’État dans le but d’intoxiquer l’opinion contre les militants anti-régime. Ces efforts semblent s’accélérer au milieu d’une crise majeure pour le régime iranien, y compris la recrudescence de la dissidence populaire. Il y a eu un soulèvement à grande échelle à la fin de 2017 et au début de 2018, et un autre qui a brièvement éclaté dans près de 200 localités en novembre 2019, avant d’être réprimé dans le sang et une répression qui a fait environ 1 500 morts.
En septembre 2020, Amnesty International a publié un rapport sur les conséquences de ce soulèvement et de cette répression et a noté que les assassinats et les arrestations n’étaient que le début d’un schéma plus large d’injustices. La justice des mollahs «portant des accusations de sécurité nationale contre des centaines de personnes uniquement pour avoir exercé leurs droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique, tandis que les juges se sont rendus coupables d’«aveux entachés de torture ».
Ce rapport a été récemment cité dans une déclaration signée par 24 membres du Parlement européen, qui a attiré l’attention sur le cas de Saïd Sangar et a fait valoir que sa peine de prison prolongée faisait partie d’une répression croissante. « Nous sommes profondément préoccupés par la situation alarmante des droits de l’homme en Iran, en particulier par la récente vague d’exécutions et d’arrestations massives à travers le pays depuis décembre 2020 », a écrit le communiqué.
La déclaration, rédigée par les Amis d’un Iran libre (FOFI) au Parlement européen, a noté le cas de Sangar et les exactions menés par des bourreaux tel qu’Ebrahim Raïssi, l’actuel chef du pouvoir judiciaire, « montrent qu’on ne peut pas s’attendre à ce que les auteurs [d’abus spécifiques] rendent des comptes pour leurs exactions ».
En 1988, Raïssi a joué un rôle de premier plan dans les «commissions de la mort» dans les prisons de la République islamiste en réponse à une fatwa du fondateur du régime, Rouhollah Khomeini. Ce décret religieux a effectivement été édicté concernant l’accusation pour laquelle Sangar s’est vu infliger une longue peine de prison. Khomeiny a spécifiquement déclaré que les membres de l’OMPI étaient des ennemis de Dieu et devaient donc subir une exécution sommaire. Cela est alors devenu la mission principale des commissions de la mort qui ont ordonné l’exécution d’environ 30 000 prisonniers politiques en l’espace de quelques mois en 1988 en Iran.