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Communiqué du Comité international pour l’application de la justice

 Les documents publiés sur les crimes des régimes irakien et iranien en Irak

Comité International pour l’application de la justice (ISJ), 25 octobre 2010

Les crimes commis par le gouvernement, l’armée et les forces de sécurité d’Irak sous instructions directes d’Al-Maliki et les crimes du régime iranien en Irak, dont les documents ont été publiés ces derniers jours, ont choqué et blessé la conscience humaine de notre époque.

Ce qui a été révélé ces jours-ci au monde, sur la conduite d’Al-Maliki et de son système de subordination ainsi que celle du Corps des gardiens de la révolution du régime iranien (CGR) et de la Force terroriste Qods relève sans aucun doute et sous tous les critères, de crimes contre l’humanité et ceux qui en sont responsables doivent en répondre devant la communauté internationale.

Toutefois, au Comité international pour l’Application de la Justice (ISJ) nous sommes plus ou moins familiers de cette question et dans nos communiqués et notre correspondance avec les États-Unis, l’Irak et autorités des Nations Unies, en particulier ces deux dernières années, nous avons mentionné à plusieurs reprises des actes liés à la répression pénale du camp d’Achraf, qui abrite 3400 opposants iraniens. Malheureusement aucune mesure efficace de protection n’a été mise en œuvre jusqu’à présent. Par conséquent, nous saisissons l’occasion pour souligner les points suivants:

1. Nous approuvons pleinement l’appel d’Amnesty International aux Etats-Unis d’enquêter dans quelle mesure les responsables américains étaient au courant de la torture et d’autres mauvais traitements des détenus par les forces de sécurité irakiennes après l’émergence de nouveaux éléments dans les dossiers publiés par l’organisation Wikileaks vendredi. Nous convenons également avec Amnesty International que ces documents « ajoutent à notre préoccupation comme quoiles autorités américaines ont commis une grave violation du droit international en remettant sommairement des milliers de détenus aux forces de sécurité irakiennes, dont elles savaient qu’elles continuaient la torture et les exactions contre les détenus à une échelle véritablement choquante.

2. Les documents exposés révèlent que le gouvernement américain savait en détail les interventions politiques, militaires et terroristes du régime iranien en Irak. Selon le New York Times du 23 octobre, les rapports révélés de l’armée américaine avertissaient que « l’Iran prend le contrôle de l’Irak à de nombreux niveaux du gouvernement irakien ». Le New York Times a également écrit que « les rapports indiquent clairement que le combat mortel entre les milices soutenues par l’Iran et les forces américaines a continué après que le président Obama ait cherché à ouvrir un dialogue diplomatique avec les dirigeants de l’Iran et a réaffirmé l’accord entre les États-Unis et l’Irak du retrait des troupes américaines d’Irak d’ici la fin de 2011 ». Par conséquent, nous appelons à des révélations complètes des interventions politiques, militaires et terroristes du régime iranien en Irak.

3. En ce qui concerne le camp d’Achraf, les documents révélés font peser une lourde responsabilité sur le gouvernement des États-Unis, des Nations Unies et toutes les parties internationales concernées. La première vérité révélée par ces documents est que non seulement le gouvernement et les forces d’Irak n’ont ni la compétence ni la capacité de protéger les résidents d’Achraf, mais ils deviennent aussi facilement un instrument entre les mains du régime iranien pour réprimer son opposition. Cela vient renforcer les appels répétés lancés par l’ISJ à la réinstallation des forces américaines et par conséquent de l’équipe de suivi de la MANUI à Achraf afin d’éviter une nouvelle catastrophe humanitaire déjà survenue à la fin de juillet 2009 par les forces irakiennes et le régime iranien.

4. En 2008, nous avons exhorté les autorités américaines à ne pas transférer la protection des résidents d’Achraf aux forces irakiennes et les avons averties que ce serait le prélude à une catastrophe humanitaire. J’ai conduit en octobre 2008 une délégation de cinq membres du Parlement européen et du Parlement norvégien, qui a visité Achraf, a vu ses habitants, les Irakiens, les Américains et la MANUI. Nous pouvions très bien pressentir une catastrophe potentielle. Le dernier jour de ma visite à Achraf, dans une lettre au président Bush, j’ai fait appel à lui pour ne pas remettre la protection d’Achraf aux forces irakiennes, ce qui était une violation flagrante du droit international. J’ai écrit des lettres similaires à d’autres autorités de l’administration du président Bush, ainsi qu’à l’administration du président Obama. A chaque fois j’ai reçu la même réponse, à savoir que le gouvernement irakien avait fourni au gouvernement des États-Unis des assurances écrites d’un traitement humain des résidents d’Achraf en conformité avec les obligations internationales(…) Nous avons averti le gouvernement des États-Unis d’alors qu’on ne pouvait pas faire confiance aux engagements d’un gouvernement sous l’influence de l’Iran.

5. Les documents divulgués indiquent ainsi que les interventions du régime iranien en Irak et les actes criminels du gouvernement Al-Maliki, non seulement n’ont pas diminué sous le président Obama, mais se sont intensifiés. Les actes répressifs contre Achraf au cours des deux dernières années, incluent notamment les atrocités des 28 et 29 juillet 2009, deux années de siège cruel et de torture psychologique de ses habitants pendant 9 mois avec 80 haut-parleurs. Ces documents montrent aussi qu’il existe un fort potentiel pour un massacre par les forces irakiennes sous Al-Maliki et que nos préoccupations quant à une catastrophe humanitaire exprimées à plusieurs reprises durant l’année écoulée étaient bien fondées.

6. Il ne fait aucun doute que le transfert de la protection des résidents d’Achraf aux forces irakiennes a été une violation flagrante des conventions internationales en particulier de la quatrième Convention de Genève qui a été officiellement reconnue par les États-Unis en 2004. Le statut de personnes protégées des résidents et les droits et la protection qui en découlent ne peuvent en aucun cas être annulés jusqu’au règlement final de la situation et tous ces actes ont été commis en violation du droit international. En outre, en échange de leur désarmement, les forces américaines ont signé un accord avec chaque individu à Achraf pour prendre en charge leur protection jusqu’au règlement final de leur situation.

7. L’article 45 de la Quatrième Convention de Genève précise que les « personnes protégées ne peuvent être cédées qu’à un Etat offrant des garanties à l’État transférant d’étendre la protection de la Convention aux personnes concernées ». Les documents divulgués indiquent clairement que non seulement le gouvernement américain n’a pas reçu les assurances nécessaires, mais aussi, comme cela a été révélé ces jours-ci, selon les rapports des forces américaines, les États-Unis avaient tous les accès aux preuves et documents indiquant l’ampleur des interventions du régime iranien et son influence sur l’Irak d’une part, et la violation sauvage systématiques des droits humains par le gouvernement irakien, d’autre part, pour ne pas faire confiance et accepter les promesses de ce gouvernement sur le traitement humain des résidents d’Achraf en conformité avec les normes internationales. Le gouvernement américain disposait de preuves suffisantes pour conclure que le gouvernement irakien n’avait ni la capacité ni la volonté d’appliquer la convention internationale.

8. En outre, l’article 45 de la Quatrième Convention de Genève précise également la responsabilité de l’État transférant quant à la conduite de l’État cessionnaire durant la période où les personnes protégées sont protégés par le second. Il prévoit expressément que si l’Etat cessionnaire ne parvient pas à honorer ses obligations envers les personnes protégées, la partie cédante – ici les Etats-Unis – doit prendre des mesures efficaces pour corriger la situation, ou demander le retour des personnes protégées Elle ajoute qu’une telle requête doit être respectée. Ainsi, dans les circonstances actuelles, cet article exige clairement que la protection des résidents d’Achraf soit immédiatement rendue à l’armée américaine. Dans le contexte ci-dessus, tout en soulignant la nécessité de révéler tous les documents relatifs au traitement répressif des résidents d’Achraf par les forces irakiennes, l’ISJ demande que les mesures urgentes suivantes soient prises pour éviter une autre catastrophe humanitaire:

a. Les forces américaines et par la suite l’équipe de surveillance la MANUI doivent s’installer dans le camp d’Achraf pour garantir la protection des résidents. La conduite et les relations mutuelles doivent revenir à la situation antérieure à 2009 lorsque les forces américaines étaient responsables de la protection du camp.

b. Les forces irakiennes responsables d’actes de répression contre Achraf doivent être conduites hors des lieux et s’installer dans les bâtiments et les installations à l’extérieur du camp qui leur avaient été attribués par les habitants au début de 2009.

c. Il convient de préciser que les résidents d’Achraf sont toujours considérés comme des personnes protégées en vertu de la Quatrième Convention de Genève et doivent jouir des droits fondamentaux et de la protection de la Convention. Le siège cruel de 22 mois contre Achraf et les 9 mois de torture psychologique des résidents du camp doivent cesser et les agents du ministère iranien du Renseignement, qui sont illégalement installés à l’entrée principale et à l’angle sud du camp et soutenu par le gouvernement et les forces d’Irak, doivent être renvoyés.

Alejo Vidal Quadras
Vice-président du Parlement européen
Président, Comité international pour l’application de la Justice (ISJ)